girls

Sue observe minutieusement le résultat de sa routine maquillage dans la glace encadrée de néons de sa chambre. Pas de démarcation, ses faux-cils sont parfaitement placés et ses lèvres sont parfaitement peintes d’un rose presque fluo. Elle passe un dernier coup de brosse dans sa chevelure devenue blonde après de nombreux passage chez un coiffeur du quartier, se remet un coup de laque puis fixe son serre tête en centrant le nœud qui y est accroché. Satisfaite par le résultat, elle s’adresse un clin d’œil, un sourire, puis se lève pour aller enfiler ses talons. Elle n’a pas besoin de faire plusieurs essayages, elle a défini sa tenue par avance et a tout accordé.
La jeune femme attrape son sac à main sur le porte manteau suspendu à la porte de sa chambre puis en sort. Comme à chaque fois, elle prend soin de donner un coup de clé et glisse celle-ci dans la poche avant de son sac. Elle a longtemps soupçonné ses colocataire de venir emprunter ses affaires durant son absence et il était hors de question que ce petit jeu perdure. On n’est jamais trop prudent !
Satisfaite, elle traverse le salon et prévient les filles qu’elles ne doivent pas l’attendre parce qu’elle a des plans. Elle entend un « whatever » s’élever de quelque part dans l’appartement et décide d’ignorer la réplique méprisante. De la jalousie pure et simple, se dit-elle en haussant une épaule. Barb attrape son manteau, l’enfile, noue la ceinture qui y est rattaché à sa taille (en serrant un maximum pour mieux dessiner sa silhouette) puis sort en claquant la porte derrière elle.
La descente des quelques marches menant à l’extérieur se fait le nez rivé sur son portable. Ses deux pouces s’agitent sur le clavier numérique alors qu’elle prévient Jade de son départ et lui confirme le lieu de leur rencontre. Elle commande ensuite son Uber puis, pour tuer le temps, répond à quelques messages laissés par de beaux inconnus sur ses sites de rencontre. Par principe, elle e répond pas aux moches.

Elle salue à peine son chauffeur lorsqu’il la récupère puis continue à nourrir des conversations enflammées avec ses amants (ou futurs amants) durant le temps que dur le trajet jusqu’au Blue Frog’s. Elle aime le nom du bar et son ambiance. La clientèle est principalement masculine (surtout les soirs de match) et elle y a fait d’intéressantes rencontres… Et puis les cocktails sont aussi beaux que bons.
Sue Barbie s’extraie du véhicule en adressant un rapide au revoir au chauffeur à qui elle n’a même pas adressé un seul regard, puis accélère le pas pour rejoindre l’établissement, ses talons claquants sèchement sur le trottoir.
Elle cherche Jade du regard et est contrariée de constater qu’elle ne l’aperçoit nul part. D’ordinaire, c’est elle qui se fait désirer et arrive en retard. Elle tique, réclame une table pour deux au serveur et s’installe. Par principe, elle demande au serveur de lui nettoyer la table.
« Je l’ai fait il y a deux minutes. »
« Je n’étais pas là il y a deux minutes mon chou et on ne se connaît pas assez pour que je te fasse aveuglément confiance. Mais après quelques verres, je suis certaine qu’on en arrivera là. En attendant… »
Sans un mot, elle effectue des petits cercles du poignet pour mimer un nettoyage sommaire, affichant un large sourire. Le serveur le lui rend, avec autant de fausseté et s’exécute.
« Vous voulez commandez tout de suite ou vous préférez attendre votre amie ? »
« Je n’attends personne. Jamais. Je vais prendre un Sex on the Beach pour commencer. Et est-ce qu’il serait possible que le sachet de cacahuète soit ouvert sous mes yeux ? Mon amie est enceinte et il faut qu’elle évite les germes au maximum… »
« Bien sûr. »
Nouveau sourire crispé, que Sue lui rend volontiers avant de redonner sa pleine attention à son téléphone. Elle voit du coin de l’œil le serveur s’éloigner et renvoie des messages à gauche et à droite. Elle n’a jamais fini d’en envoyer… Victime de son succès, voilà ce qu’elle est…

Elle est en pleine rédaction lorsque son amie s’approche enfin de sa table pour la saluer. Sans lui adresser un regard, Sue lève son index dans sa direction pour la faire patienter, fait courir ses doigts sur l’écran encore une dizaine de secondes, puis pose son appareil sur la table. Elle se redresse alors, souriante… Durant une seconde. Et puis elel détaille son ami de haut en bas.
« Oh ma chérie… Je comprends maintenant pourquoi tu avais tellement besoin qu’on se voit… » grimace-t-elle en s’attardant sur son visage bouffi et son ventre difforme. Elle doit avoir besoin d’évacuer, de se décharger… Enfin physiquement, il n’y a rien qu’elle puisse faire pour l’instant mais au moins moralement.
Elle passe un bras autour de ses épaules et colle ses deux joues sur les siennes. Faire la bise lui donne un petit côté sophistiqué qu’elle apprécie, même si elle réserve cette salutation française à ses plus proches amies uniquement.
« Assieds-toi. Tu dois avoir du mal à tenir debout trop longtemps ma pauvre. Attends, laisse-moi tirer ta chaise ! »
Ce qu’elle fait, l’éloignant de la table de plus de 70cm. Il doit falloir au moins ça pour que l’énorme ventre de son amie passe…