Quand la vie n'est pas aussi simple qu'on le voudrait - Feat Leo

6th january, 2018.

« Je suis prévenue alors je ferais attention. Il acquiesce, compte là-dessus, il sait à quel point cette femme peut être un enfer quand elle s'y met, ce serait dommage que Fanny ait à gérer ses petites crises d'adolescence en retard. Pour l'avoir vécu, il se souvient de cette panique ancrée au fond de lui – toutes ces questions qui s'étaient imposées à lui comme convaincu que ça pourrait l'aider. Conneries, ça n'avait fait que le paniquer davantage ; Edith avait passé un bon moment et s'il en rigole aujourd'hui, il se souvient avoir été particulièrement tendu ce jour-là. T'en fais pas pour elle, c'est une chic mamie, c'est un peu la notre au fond, alors il ne lui arrivera rien de mal. Il laisse un petit rire s'extirper d'entre ses lèvres, quelque-chose de léger qui contraste avec ses traits fatigués. Leo en oublierait presque vraiment la douleur, les derniers événements ; Dieu qu'il aurait voulu que rien de tout ceci n'arrive. Claudia lui manque, plus que jamais en cet instant ; et pourtant, il parvient à ancrer ce rictus sur ses lèvres, à continuer sur cette lancée que Fanny fait perdurer. En cet instant précis, finalement, cette jeune femme devient son havre de paix. Pas Daniel, pas Taylor, pas Aiden. Non, elle et juste elle. Au pire, je lui achèterais une paire de lunette de soleil pour qu'on joue les espions dans la maison de retraite, une bonne façon de partir en mission commando en quelques sortes. Il lui revient d'ailleurs, fronçant les sourcils à ce qu'elle vient faire entendre. Leo s'y risque, imagine la scène. Il souffle, désabusé, prit de court par le ridicule de ce qu'il voit dans sa tête. Et finalement, ce n'est pas la pire des idées – au contraire. C'est un fait, il doit le reconnaître. T'imagines la scène, genre on serait les women in black, un truc du genre. » Oui il l'imagine, plus que jamais en cet instant d'ailleurs. Le rire qu'elle laisse s'installer engraine le sien, Leo luttant pour respirer en continuant de se jouer ce drôle de film. Les cartes sont posées, le ventre tenu. La folie ou la fatigue probablement mais il n'arrive pas tellement à s'en remettre. Et ça lui fait un bien fou au final, autant que ça ne le fatigue. Les heures ont été longues, les épreuves douloureuses. Il les ressent au fond de lui, tapis dans l'ombre, prêtes à revenir le hanter dès lors que les éclaircies de Fanny s’évanouiront. C'est une vérité qu'il doit garder en tête mais pour l'instant, il n'offre d'attention qu'à la jeune femme l'ayant recueilli, mettant une bonne dizaine de minutes pour réussir à parler. « Je veux être là quand ça arrivera, interdiction de jouer à ça sans moi – quitte à devoir m'habiller en fille pour faire partie du gang, je te préviens. » Il insiste sur cette requête, s'essaie à avoir cet air sérieux mais n'y parvient pas tellement.

Au lieu de ça, il abandonne la partie en cours, lui offre le titre de vainqueur ; Leo lui prouvera plus tard qu'il est le meilleur. Pour l'instant, c'est dans le canapé qu'il vient chercher du réconfort, s'excusant auprès de la jeune femme, laissant entendre que le manque de sommeil le rattrape. Un film. C'est ce qu'il demande, qu'ils se posent devant un film, qu'il laisse l'obscurité avoir raison de sa conscience malmenée. Et elle accepte, bien-sûr qu'elle accepte. C'est Fanny, celle qui accoure dès lors qu'il sent la chute se rapprocher. Elle est là, présente – comme toujours. Elle est là, à ses côtés, sous sa tête qu'il laisse tomber contre ses jambes dépliées. Une minute à peine. Il aura tenu une minute avant de s'endormir, avant de laisser cet effroyable néant s'imposer. Pas une pensée, pas une larme. Seulement la noirceur, le trou béant duquel il lui faudra remonter. Leo se laisse aller, éperdu dans les marées au cœur desquelles Claudia l'a délaissé. Elle n'est plus là, pas même une brève image d'elle n'a perduré à portée de bras. Rien. Seulement rien, l'absence de tout – le silence absolu. Là, entre des murs où Fanny lui aura épargné de devenir fou.


END.