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 you were my decision ø ONESHOT

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Judith C. Williams

Judith C. Williams

crédits : ava+gifs me
messages : 542
quartier : West Side, petite maison de quartier avec Emerson Williams, son frère

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MessageSujet: you were my decision ø ONESHOT   you were my decision ø ONESHOT EmptyLun 25 Mar - 13:30




you were my decision

ELLIPSE DE 4 MOIS

LUNDI 2 AVRIL 2018 ;
DOMICILE DE JUDITH WILLIAMS & MATTHEW GOODWIN, DOWNTOWN


11h. J’observe le paysage urbain par la fenêtre ouverte de ma chambre, épuisée, le corps las et lourd. Je pousse un soupir et me sors de la spirale dans laquelle je suis tombée de longues minutes plus tôt. Je baisse mon regard vers mon téléphone, récupère l’appareil de secours (l’autre laissé au Crashdown) et lis les différents messages qui s’affichent sur l’écran cassé. Un de mon frère Louis qui me demande si tout va bien, insiste pour faire le Skype normalement prévu cet après-midi. De l’autre, un message de Natalia, après l’avoir rassurée et annulé la séance de musique normalement habituelle d’Eliott, le samedi. Je n’aurais pas la force avant certainement la semaine prochaine ou celle d’après. Bien sur qu’elle a compris, elle s’enquiert de savoir si je vais bien et je me décide à répondre plus tard. Un autre message d’Alma que je ne regarde pas, … Bref deux trois autres, des mails de newsletter, des notifications d’applications diverses et variées. En bref, l’écran de mon téléphone est pollué mais je n’ai pas envie de me pencher là-dessus pour l’instant. Je suis plutôt occupée à ruminer les évènements qui viennent à peine de se dérouler. Madmax arrêté puis condamné, dans le même temps une fusillade, une prise d’otage. Les images et les sons ne me laissent pas de répit.

Je me laisse retomber sur le côté, passe une main sur mon visage alors qu’un rayon de soleil m’arrive droit dans les yeux. Je n’arrive pas à dormir depuis, et quand je m’écroule ce n’est jamais très reposant. Énième soupir. Je finis par lever l’écran devant mes yeux et parcourt le reste des messages. Alma me demande si je veux qu’elle envoie une fille chez Max et ranger le bordel foutu par les flics quelques jours plus tôt ou si je m’en charge. Je note le code de l’appareil pour entrer sur l’interface et lui réponds que je vais le faire, et que je vais m’occuper de ranger aussi le bordel chez Kurtis. J’imagine qu’elle a d’autres trucs à faire, avocate attitrée du club, elle a du pain sur la planche ces derniers jours et j’aimerais autant qu’elle se concentre à défendre mon mec. Je sais même pas comment elle a pu penser à ça en si peu de temps, surement sous l’eau.
Je laisse tomber mon portable à côté de moi et décide de me lever enfin, en poussant encore un soupir, glisse mes pieds dans mes chaussons et me mets à m’activer. Je n’ai pas faim, mais par acquis de conscience glisse un biscuit entre mes lèvres histoire de remplir vite fait mon estomac, puis me dirige vers la douche.

ø

« Putain… » Je secoue le sac poubelle devant moi, observe l’intérieur en bordel. Les flics s’y sont donnés à cœur joie, se sont visiblement souciés de rien. Ils ont éventrés des trucs, foutu le bordel dans sa collection de vinyle si bien organisée, dans sa cuisine, sa chambre, ses fringues. Tout a été renversé, inspecté, cassé, ouvert, peu importe. Je sais pas ce qu’ils cherchaient ici mais en tout cas je les remercie pas pour le bordel. Un peu d’zèle de flics quoi. Ces chiens ont aucune considération.

Mais enfin, ça m’occupera l’esprit, alors c’est parti pour la deuxième maison de la journée, je range et commence par réorganiser ses disques et en poser un sur sa platine histoire de remplir l’espace d’un son plus agréable que les bagnoles et bécanes qui passent dehors. J’ouvre en grand la baie vitrée et certaines fenêtres pour faire passer l’air et me met au boulot, bien vaillante. Au moins, ça a le mérite de me faire penser à autre chose, je me concentre sur les trucs à ranger, les autres à jeter, et finalement au bout d’une heure ou deux la maison reprend une allure correcte. J’ai encore des trucs à ranger, mais m’arrête là pour l’instant, le principal est fait et je suis épuisée par les heures que je viens de passer à ranger, ici et en premier chez Kurt. Les chiens apeurés ont pissés partout, il y avait du sang sur le sol et les murs, c’était un bazar encore plus sale que chez Maximilian. Je me laisse tomber sur l’accoudoir du canapé de Max, observe les fringues que j’ai repliées et posées sur la table, les divers objets qui les accompagne et que je dois replacer. Un coup d’aspirateur fera pas de mal mais je m’octroie une pause bien méritée alors que le vinyle de vieux rock tourne toujours sur la platine. Je passe une main sur mon front, me laisse glisser lâchement dans le fond du canapé, allongée, les jambes posées sur l’accoudoir sur lequel je me tenais quelques secondes plus tôt.  

Je lève un regard vers l’horloge encore intacte mais posée au sol : il est passé 17 heures ; je pousse un soupir. Je reste là un moment, le regard détaillant sur le plafond, l’oreille attentive aux sons du disque qui tourne. Je liste ce que je dois faire, étend les tâches comme sur un tableau mental. Je dois retourner voir Gram et Ringo, faire une longue sortie pour les pauvres chiens qui sont restés seuls un moment.
Je dois rentre visite à Joleen.
Rendre compte à Alma.
Terminer de ranger la maison de Max, passer à l’heure habituelle de sa femme de ménage.
Passer l’aspirateur.
Chercher un autre boulot.
Prendre un moment pour récupérer du trauma.
Accepter le trauma.
Aller récupérer mes affaires au Crash.

Les tâches continuent de se dévoiler alors que je me sens tomber lentement dans les limbes, les yeux fermés, allongée à moitié n’importe comment sur le canapé que j’ai remis en place. Je ne lutte même pas, me contente de continuer à réfléchir à ce qui m’attend ces prochains jours, et de sombrer, jambes et bras qui pendouillent. Le sommeil est si absent depuis l’événement que je ne cherche même pas à lutter.

ø


MERCREDI 18 AVRIL 2018 ;
DOMICILE DE KURTIS HAWKINS, WEST SIDE


« Ringo… Ringo du calme, allez, ça va. »

Le chiot s’est vite remis du bordel visiblement. Enfin le chiot, le moyen chien maintenant. Je caresse son museau, gratte derrière ses oreilles, le machin qui grandit très vite est lourd mais toujours aussi vif alors qu’il se colle, enfin, fonce dans mes grandes jambes pas très solides. Je passe tous les jours, m’occupe des chiens, remets en ordre le bordel qu’ils foutent à chaque fois que je ne suis pas là. Je suis restée quelques jours d’affilée ici, c’est plus pratique et plus proche de chez Max que quand je suis chez moi.

Maximilian est condamné à quatre mois de prison. Ce serait mentir que de dire que ça me fout pas le cafard, ça me déprime, et les passages au parloir sont loin d’être suffisant pour combler le manque que les flics ont créés. J’avais pas besoin de ça pour savoir que j’ai des sentiments pour le KOS, mais bon pour sur que cette fois j’en ai la confirmation plus que concrète.

Je regarde l’heure en passant la laisse au cou de Gram, j’attrape mon manteau, les clefs de la maison de Kurt et c’est l’heure de faire la ballade. En parlant des KOS, je dois faire un tour au parloir tout à l’heure et je compte bien ne pas arriver en retard. Je vois d’abord Maximilian puis Kurtis. C’est étrange de se retrouver de ce côté de la barrière, au moins on pourra pas dire que j’ai pas fais les deux. Je m’inquiète de ce qui pourrait se dérouler au sein de cette prison. Je sais comment ça se passe, je me doute de la violence qui a son emprise dans ce type d’établissement. Je sais que les prisonniers sont intelligents, rusés, je sais aussi qu’il est dangereux d’y rester et qu’on ne sait jamais ce qu’il peut se passer. J’essaie de ne pas penser aux éventualités terribles qui pourraient se dérouler et m’enlever mon mec et/ou mon ami. Ça me file la chaire de poule.

« Allez on y va.
— Salut Juju !
— PUTAIN, Meg, je t’ai pas entendue arriver tu m’as fichue une frousse d’enfer.
— Mes excuses Milady ! La grande perche fond sur moi pour embrasser mes joues.
— Tu tombes à pic, je sors les clebs. Prends Gram. » Je ne lui donne pas le choix.

J’ai l’habitude de la voir débarquer ici. Parfois, elle reste avec moi, on regarde des trucs à la télé, on papote, on sort les chiens, on dort, elle va faire ses trucs et moi les miens. J’ai repris du service, hier, au Homewrecker. Les KOS sont là pour moi (je peux pas nier ça), Thomas est présent, James m’a offert un job, je vais souvent voir Natalia, Alma s’enquiert souvent de mon état et s’assure que je ne manque de rien. Mais c’est bien aussi, de se démerder seule, j’ai un loyer à payer même si je n’utilise plus vraiment ledit appartement. Il fallait bien que je me remette à bosser un jour. Alors voilà, je fais serveuse au Homewrecker. C’est un des trucs que je vais raconter à Max taleur, des trucs du quotidien, c’est peut-être nul mais j’imagine que ça le change de son temps à l’ombre. Moi, j’aimais quand mes frères me racontaient ce qu’il se passait à l’extérieur, ça me changeait les idées, l’espace d’un instant.

Un rappel sonne sur mon téléphone à deux heures de l’après-midi et quasiment simultanément, des coups sont toqués à la porte de chez Kurtis. Meghan est partie depuis un moment, les chiens dorment dans le salon et j’ai mangé mon maigre repas. J’ai du perdre un peu. C’est l’heure d’aller au parloir et c’est Thomas qui vient me chercher, m’emmener, donner son temps à Max après moi, pendant que je causerais à Kurtis. Et j’avoue que ça me fait plaisir de faire le chemin pas toute seule même si évidemment, lorsqu’il est indisponible, j’y vais quand même. Je ne manque aucun rendez-vous, c’est comme ça. Je me fais ponctuelle et essaie de lui changer les idées.

ø

« Attends, une seconde. Je descends le pare-soleil et m’observe dans le miroir, côté passager. Ce serait bien que tu me laisses conduire à l’occaz t’as cru que j’avais eu mon permis dans une pochette surprise ou quoi ?
— Ah je sais pas, on m’a largement conté ta maladresse miss.
— Ouais ouais, ok. Je lui jette un regard de travers, les lèvres malgré tout étirées dans un mince sourire. Je reviens donner de l’attention à mon visage dans le petit miroir rectangulaire, laisse retomber mes cheveux, observe mes cernes sur lesquelles je passe mes doigts et pousse un soupir. Bon, allez, on y va. Je peux pas faire des miracles pour ça. Je pointe du doigt les valises que je me traine sous les yeux légèrement maquillés et lâche un léger rire alors que Thomas sort de la bagnole, s’extrait une clope du paquet et m’en donne une au passage.
— T’auras plus qu’à mettre le paquet à sa sortie.
— T’inquiètes pas. »

ø


« Judith Williams, je viens voir Maximilian Warham.
— Passez par là Madame, et laissez votre sac. » Je connais la procédure, j’ai l’habitude, laisse Thomas derrière moi se débrouiller, attendre, alors que je laisse passer mon sac, mon manteau, le contenu de mes poches, etc… Il me faut plusieurs minutes le temps d’être inspectée, récupérer mes affaires et me poser à une place que l’on m’a indiquée. Ils vont aller le chercher me dit-on, alors j’attends, tranquillement. Lorsqu’enfin sa masse passe la porte, se pose sur la chaise en face de moi, je laisse un sourire s’étaler sur mon visage et je lui adresse un geste de la main avant de me saisir du combiné. On lui a coupé les cheveux et il n’a plus de barbe, ça me change de le voir comme ça. Tant qu’il n’a pas l’air en mauvaise santé, peu m’importe en réalité.

« Comment ça va ? Il est le premier à parler.
— Ça va. J’ai repris le taff, au Homewrecker, hier, pour me remettre dans le coup un peu.
— En tant que serveuse j’espère ! Je laisse échapper un rire.
— Pf évidemment, je suis trop chère et fancy pour eux. Il se marre avec un air d’approbation. C’est mieux que de couiner hein, vaut mieux se marrer un peu.
— T’es retournée au Crash ? J’acquiesce tranquillement, c’est pas franchement le sujet le plus fun et les souvenirs middle s’y accumulent mais bon. Il me pose la question je vais pas lui dire non. Ça a quelle gueule ?
— Hm… J’hésite. Je suppose que les autres KOS ont du lui en parler un peu. Le crash a pris cher, y’a eu pas mal de dégâts, physiques et matériels. Je sais à quel point le club compte pour lui et j’ai pas trop envie de le démoraliser alors qu’il peut rien faire derrière les barreaux.
— Dis-moi franchement. Je laisse une seconde de silence et puis lui accorde ce qu’il veut.
— Y’a pas mal de dégâts. La moitié du parquet est flinguée, on a essayé de ranger le plus gros mais y’a pas mal de travaux à faire. Les vitres du haut sont pétées, les néons, le bar est dans un sale état, le mobilier finalement c’est pas le pire. Les loges sont plutôt safe, les salles du fond également. C’est surtout la salle principale et le coin VIP qui ont pris. Désolée. »

Il se contente de hocher la tête, il intègre, processe le truc. Je sais pas trop ce que les KOS lui ont dit mais j’ai pas envie de lui mentir sur l’état des choses et je pense qu’il préfère avoir la version honnête. Ça semble pas durer très longtemps, il revient rapidement à une conversation normale, il refait son gros malin deux secondes après l’annonce. J’essaie de le suivre sur le truc, en vrai j’aime pas trop le voir là, sapé comme un taulard, je me dis que dès qu’il quittera le parloir il sera à nouveau en danger. Il me demande comment ça va, si je vais bien, si je manque de rien. Le temps passe tranquillement et puis viens l’heure de passer à Kurtis. La discussion se clôt sur le même ton, bien que pour ma part j’avoue je suis réticente à laisser tomber le combiné. Je lui adresse un sourire et lui envoie un baiser pour la blague, comme d’habitude, parce que je suis trop mignonne et qu’autant le quitter avec le sourire.

« Avant même q’tu poses la question : Oui, tes chiens vont très bien.
— Va chié.
— Ah, bah voilà, je retrouve mon Kuku des bois. Je lui adresse un sourire. Ça va ? Il hausse une épaule, à sa manière, c’est pas le plus bavard des deux en réalité, déjà Max est pas très axé sur la parlotte (enfin sur une échelle de 0 à moi il est dans la normale) mais Kurt c’est pire. Mais c’est pas grave j’ai pris l’habitude et il parle beaucoup plus qu’au début maintenant c’est déjà ça ! J’ai croisé ta sœur taleur, elle me charge de t’envoyer « mille baisers » a-t-elle dit et pleins d’autres trucs dont je me souviens pas mais en gros elle t’aime quoi, je pense que ça suffit à résumer son discours. Il a toujours cet air blasé sur la gueule au moins on peut pas dire que la prison le changera là-dessus c’est inné.
— Et toi ç’va ? T’l’air fatiguée.
— Ouais, ouais. J’dors pas bien. Mais j’me r’mets à bosser t’sais, chez James, et puis voilà, la routine, les allers-retours chez toi pour passer du temps avec les clebs. J’ai squatté un peu pour que ce soit plus simple et pas trop les laisser seuls. Et comme ça je suis pas seule non plus.
— Ouais ok.
— Ça s’passe ? »

Il me répond du même ton plus ou moins monocorde en fonction de s’il m’envoie chier ou pas, ce qui me fait rire et me rassure sur le fait qu’il est encore lui-même derrière les barreaux. C’est ce qu’il faut. On finit par nous dire que c’est terminé, je suis bien décidée à prendre toutes les minutes que j’ai le droit de prendre mais lorsqu’on m’interpelle je n’insiste pas. Je dis à Kurtis de faire attention là-dedans, que je reviens bientôt, qu’il embrasse bien fort mon mec sur la bouche pour moi (ça c’est juste pour le faire chier) et je m’éloigne bientôt, retourner récupérer mes affaires et attendre Thomas qui ne met finalement pas autant de temps que ça avant de me rejoindre. J’entends d’ici le bruit des portes, horrible son éclair dans mon oreille, ça a vite fait de me replonger dans mes petites pensées d’ex-taularde. Ce type d’endroit ne m’a pas manqué, à vrai dire, je pensais plus jamais y remettre les pieds mais déjà c’est pas de l’autre côté que je suis et c’est quelque chose.

« Allo Thomas appelle Judith
— Hein ?
— T’écoutes rien depuis taleur en fait
— Désolée, j’étais ailleurs
— On pense à son mec, c‘est çaaaa, les bouclettes te manquent ?
— Ah, à toi aussi nan ? » On marche vers la voiture et cette fois je le prends de court et m’installe côté conducteur avec la résolution de prendre le volant. Je reste la et en vrai il abdique quasiment immédiatement. On continue de discuter tranquillement sur le chemin du retour. On est restés un bon moment. Ça me fait du bien, j’espère juste que tout se passera correctement d’ici à ce qu’ils sortent tous les deux.

ø

MERCREDI 23 MAI 2018 ;
DOMICILE DE JUDITH, DOWNTOWN



« Tu t’en sors sur ce dossier ?
— Tournant intéressant, la partie adverse a délivré des aveux.
— Oh wow, c’est pas tous les jours que j’entends ça.
— Clairement, on ne s’y attendait pas, mais du coup on a gagné « par forfait » si on peut dire ça.
— C’est cool… c’est cool. Je suis contente que ça se passe bien.
— Ça va mieux toi ?
— Hm, ouais, on s’y fait, le temps passe, etc… Bref toutes ces conneries quoi.
— Ouais. Tu sais bien hein, si t’as besoin de causer.
— Je sais ouais, je sais… Il est où mon p’tit frère au fait.
— Hinn… il est pas là aujourd’hui
— Hey quoi, il devait savoir que c’était Skype aujourd’hui ! Malotru. » Mon frère se marre dans mon écran d’ordinateur. Je suis en campement au milieu du salon de mon appart Downtown. Matthew est rarement là, ce qui m’arrange, car je l’évite, un peu. Mon colocataire est flic. Et si jusque-là j’avais pas spécialement compris ça, Alma s’est chargée de me mettre au courant à sa manière et maintenant, je ne me vois pas rester dormir sous le même toit… ça me paraît risqué. Et ça m’énerve.

On continue notre discussion un certain temps, j’ai le privilège d’apercevoir ma tante Donna à un moment de la conversation et c’est reparti pour une heure de blabla. Je suis obligée d’écouter la discussion parce que j’ai des trucs à faire mais j’imagine qu’on aurait pu y passer la journée sans aucun problème. Je bosse pas aujourd’hui et c’est cool, mais je dois aller voir Ringo et Gram, aller chercher un truc pour Natalia que j’ai vu dans une boutique et qui lui irait à ra-vir. J’aimerais caler un rendez-vous avec Joleen aussi à un moment. Alors je m’active, passe à la douche, range un peu le bordel de ma chambre avant de manger un truc vite fait histoire de pas avoir le ventre vide. Mon appétit s’est considérablement amélioré, je recommence à manger correctement et je dors mieux. Je n’ai toujours pas pris RDV chez un psy et me contente de baisser la tête quand je passe pas loin du Crash, refouler les mauvaises images et idées et voilà. La force du déni. Ça me convient pour l’instant.

Je passe une bonne heure dehors avec les chiens, me suis calée lire un truc dans le parc vide et les laisse s’amuser. Enfin Gram faire sa vie de chien blasé et Ringo le faire chier, en gros. Je le zieute quand même parce qu’il commence à être bien mastoc et Gram est plus tout jeune. Et j’entends la voix de Kurtis en background sonore qui me dit bien de faire gaffe parce que Ringo contrôle pas encore sa force. Ringo, j’en reviens pas qu’il l’ait appelé comme ça. Ensuite, bouquin rangé, chiens ramenés, nourris, flattés encore un peu, je me remets en route pour la deuxième partie de l’après-midi. J’ai faim, fouille dans mon sac pour sortir le twinkie d’urgence alors que je suis en voiture et vais chercher le top que j’ai mis de côté pour Natalia. Je dois aussi passer chercher la guitare d’Eliott qui est arrivée. Elle devait être là pour son anniversaire et par je ne sais quel miracle elle est là plusieurs mois plus tard, un retard plutôt légendaire donc. Je continue de m’occuper des leçons du petit, tous les samedis. Deux heures par séances, trois quand on va voir Ringo c’est-à-dire très souvent. Il a beaucoup progressé et n’est plus obligé de faire trainer deux accords qui rendent Natalia tarée. Ça se comprend, sa palette s’est élargie et maintenant il est encore plus mignon. Moi je continue de m’occuper de mon violoncelle sur mon temps libre. J’essaie de diversifier mes activités pour passer le temps, m’aérer l’esprit, j’essaie d’être active au maximum.

Il est pas loin de dix-huit heures quand je peux enfin rentrer chez moi. J’ai passé un temps considérable chez Kurtis, je crois que Meghan est passée par là j’ai vu des trucs trainer et d’autre rangés. Je me gare tranquillement près de chez moi, éteins la musique et sors de la bagnole les bras chargés, chantonnant l’air de Fleetwood Mac qui passait dans ma bagnole.

« Besoin d’aide p’tite sœur ? » Arrivée à la porte de chez moi, une voix derrière moi me fait sursauter, un bond sur moi-même, je lâche mes clefs et me retourne vivement. Mon cœur fait un bond dans ma poitrine alors que mes yeux tombent sur la silhouette d’Emerson, déjà plus grand que moi (qui suis grande également, donc…), qui est là tout souriant.

« EM ! je lâche un cri suraigu et lui saute au cou, une bouffée de joie et d’incompréhension me saisi à toute vitesse mais je n’ai clairement pas le temps de me pencher sur les douze milles questions qui me traversent l’esprit que j’ai déjà passé mes bras autour de son cou et le serre avec force. Mais qu’est-ce que tu fais là ??? Depuis quand ? T’attends depuis longtemps ? Je le garde tout contre moi, le laisse me rendre mon étreinte et lui pose déjà dix milles questions.
— Hola, hé, trop de questions d’un coup, Judith. » C’est étrange, tellement étrange, de l’entendre m’appeler ainsi. Mais c’est mon prénom, maintenant, et déjà au téléphone, par skype, par n’importe lequel de nos moyens de communications nous avons décidé de ne plus m’appeler qu’ainsi. C’est plus simple, cela évite les bavures et aujourd’hui il est habitué. Deux ans après mon départ de la maison, pour la première fois en chaire et en os, devant moi. Si je commençais à m’éloigner pour l’observer cette idée me permet de me raviser et je reviens le garder contre moi, n’ai que faire des paquets à côté de moi, par terre et laisse l’eau monter à mes yeux. J’arrête de parler pour ne pas trahir mon émotion alors que je serre enfin mon petit frère dans mes bras.

Il me faut un certain moment pour revenir de mon émotion et pour comprendre, assimiler qu’il est bien là, avec moi. Je finis par le laisser entrer, il m’aide à prendre mes affaires et les remonter dans l’appart. Un thé et un coca pour lui plus tard et on se retrouve au milieu de la cuisine, en silence. Ça a toujours été comme ça entre nous.

« Comment ça se passe maintenant, alors ? Qu’est-ce que tu décides de faire ?
— Je me disais que je passerais bien du temps à Chicago, avec toi. J’ai quitté mon job, j’ai envie de vivre ici. Si ça te dis, je sais que j’arrive à l’improviste mais ça veut pas dire que tu dois te sentir obligée.
— Jamais j’me sentirais obligée !
— Non mais j’te le dis. J’veux pas être un poids, j’veux qu’on se voit plus souvent mais…
— Emerson, arrête. J’suis heureuse que tu sois là. Je suis heureuse que t’envisages de rester là, dans les parages.
— J’me suis dis qu’on pouvait essayer de rattraper le temps perdu. J’y songeais depuis un moment et puis t’as eu ta période pourrie la depuis fin mars. J’me suis dis que c’était le bon moment pour débarquer. » Je l’observe, il est du genre discret et il parle généralement peu. Du coup quand il s‘exprime enfin je le laisse. Ça me fait plus que plaisir et je suis ravie qu’il veuille se faire une place dans ma vie, plus importante qu’elle ne l’est déjà. On a toujours été très proche par la force des choses sans pour autant se connaître vraiment. J’ai passé la plupart de son adolescence en prison, il s’est construit avec l’habitude de me voir derrière la glace et puis je suis partie pour m’éviter de retomber dans une spirale de merde. Alors le voir là aujourd’hui me réchauffe le cœur, me fait peur un peu, mais c’est pour le mieux. L’idée d’une vie avec lui me plait. C’est tout ce que je voulais.

« On va faire marcher ça. Faudra qu’on réfléchisse à une organisation… tout ça… Mais pour l’instant c’est pas le plus important. Je veux d’abord savoir ce que tu veux faire, ici, comment tu le sens, si t’as une idée.
— J’ai réfléchis à ça un bon moment mais la vérité c’est qu’au final, je pense prendre mes décisions directement ici. C’qui compte c’est qu’on soit ensemble pour moi, après… Je sais pas, j’me disais que j’pourrais squatter chez toi le temps de trouver un truc à moi.
— Évidemment, c’est même pas une question qui se pose. Tu restes ici, le temps que tu veux pour voir ce que t’as envie de faire. » Je tends une main, souhaite qu’il la saisisse. Ce qu’il fait dans la foulée. Je lui souris tranquillement. Je ne suis pas inquiète quant à la suite des évènements. J’ai juste envie de profiter, d’aller le présenter à tout le monde et de profiter de sa présence. Je suis sure qu’on trouvera comment arranger notre quotidien. Ça fait beaucoup de choses d’un seul coup, beaucoup d’infos encore à dégrossir. C’est pourquoi nous restons à cette table un long moment, tachons de revenir sur ces deux années et songer d’ores et déjà à la suite.

ø

VENDRED 25 MAI 2018 ;
COOK COUNTY JAIL



« Alors ça va aujourd’hui ? Pas trop triste ? Pas trop blasé ? En bonne santé ?
— Na, ça va, c’est un camp de vacances ici !
— Hin hin, oui ça se voit t’as l’air de t’amuser ! Tu penses à moi tous les soirs j’espère. Il ne répond rien, se contente de hausser ses sourcils de façon régulière histoire de communiquer ses pensées en arrière-plan et ça me fait marrer. Ça fait du bien, de voir qu’il est pas démoralisé, au fond du trou. Ça m’aide à passer l’inquiétude. J’vois que t’as gardé tes maxi-muscles, c’est bien ça. Je lui adresse un mince sourire aux abords carnassiers. C’est peu de le dire, il s’entretient je vois bien et j’ai toujours un faible pour sa masse musculaire, de laquelle je ne peux pas du tout profiter malheureusement.
— En même temps j’ai que ça à foutre ici, du sport ! J’acquiesce, y’a pas dix milles choses à faire là d’dans. Et encore, t’as pas vu Joséphine, je l’ai collé au sport il est en train de gonfler !
— T’es sur que tu veux que j’aille voir tu sais que j’aime les muscles ! Je le taquine évidemment et ça a le mérite de lui tirer un rire.
— Le jour ou je me sentirai menacé par le roi des bois achève moi tout de suite cherche pas !  Donc oui je t'en pris vas-y ! Je fais mine de sortir un papier et un crayon et je surjoue :
— C’est noté monseigneur ! Bon, t’es pas trop dur avec lui quand même ? Il lève un sourcil et répond ainsi à ma question…
— T’as vu la brindille, si je fait pas quelque chose il va pas faire long feu. Je me gausse comme une abrutie parce que je trouve l’expression bien trouvée et enchaine :
— Je sais même pas pourquoi j’ai posé la question ! Et hop, je roule des yeux exagérément pour noter le ton bien évidemment amusé de ma part. Bon faut que j’te dise un truc.
— J’te manque c’est ça ? Je pousse un soupire amusé.
— Oui, ça et un autre truc, Maximilian. Graaaand sourire parce que c’est drôle. Emerson s’est ramené chez moi. Il a quitté son boulot et vient me coller aux basques. Mon sourire moqueur se change en sourire tranquille.
— Et c’est pas une bonne chose ?
— Si. J’suis trop contente, encore pas trop sure de comment on va gérer ça mais j’suis aux anges. Louis reste en… au Texas, il a décidé de venir genre, t’vois, pour qu’on retisse des liens quoi. Ça va être tricky à la baraque surtout que hm… autre chose, Alma m’a dit que mon coloc est flic. J'ai du occulter ça un moment mais bon, maintenant…
— Tu savais pas qu’ton coloc est un flic ? Sérieusement Ju ? Je hausse les épaules avec une moue désolée. Je sais pas comment j’ai fais pour oublier, renier, je sais pas quoi avec cette info plutôt cruciale. Il secoue la tête en mode désappointé, je sais je sais, moi aussi je me déçois moi-même j’ai pourtant un spider sense du flic d’habitude.
— Si tu veux tu peux aller chez moi avec le gosse mais qu'il fasse pas de connerie dans ma baraque ! Je relève les yeux vers lui, étonnée. Je fais un rapide calcul de facilité et c’est quand même une option que j’avais pas envisagée et qui me semble géniale.
— T’es sur ? Je réfléchis en parlant à haute voix. J'veux dire,… ce s'rait trop pratique. Juste le temps qu'on se trouve un autre truc, ça me faciliterait largement les trajets chez Kurtis pour les clebs et tout.
— Ouai juste transforme pas ma piaule en truc de meufs !
— Oh si je vais m’amuser à tout repeindre en paillettes. Il tire une tronche qui me fait évidemment marrer.
— T'auras le droit de me remercier correctement quand je serais sortie de ce trou
— Bah t’as intérêt de prendre une « semaine de congés KOS » si ça existe ces trucs parce que j’ai déjà prévenu mon nouvel employeur ton petit copain blond, Double Face comme ils disent, so…
— T'inquietes donc pas pour ca la carte prison me donnera droit à pas mal de privilèges
— Je suis ravie d’entendre ça Monsieur Warham parce que je vais avoir de l’énergie et du retard à combler là, hein ! J’essaie de communiquer l’urgence de la situation à Alma mais je me vois pas trop lui dire : « Hey, Madame Lennox, je suis sure que maladie pour cause d’abstinence c’est un bon motif de fin de peine » !  
— T’inquiètes pas va, Love sait c’qu’elle fait. Je lui adresse un sourire, lâche un soupir tranquille.
— Merci en tout cas. »

ø

« Bon voilà ! Bienvenue chez Max ! Il a dit, je cite : « qu’il fasse pas de conneries dans ma baraque », c’qu’il sait pas c’est que ce sera moi qui en ferait le plus très certainement. » Emerson secoue la tête, dépose son sac avec trois fois rien dedans dans l’entrée. Il a pas l’air de savoir quoi faire avec son grand corps, il reste immobile, il veut pas s’aventurer sur un terrain qu’il connaît pas. « Ben viens ! T’inquiètes je te dis, il est pas du genre à proposer des trucs qui le font vraiment chier.
— C’est sympa de sa part.
— Bah, en même temps vaut mieux ça que… Je m’arrête dans le fil de pensée, parce que je suis plus toute seule maintenant et bon, ben, même si Emerson se doute que Max fait pas partie de l’élite de la CPD c’est pas une raison pour lui mettre sous le nez les agissements KOS.
— J’ai pas douze ans tu peux m’dire c’que tu penses Ju.
— Bah mon coloc est flic quoi.
— Je vois. » Y’a pas de jugement dans sa voix juste un fait. Il finit par reprendre son sac et s’avancer dans le salon. « Plutôt pas mal comme baraque. Belle collection de vinyle.
— Ah, ses bébés. J’y touche rarement, même si je porte plein d’assiettes et de verres en même temps j’ai toujours peur qu’un d’ses trucs se pête magiquement dans mes mains. Tu veux boire un truc ? Y’a rien de « pas bon pour sa santé », c’est un mister bio.
— Ah ouais et t’arrives à faire avec ça ?
— T’inquiètes, mate ça. J’ouvre la porte d’un placard pour lui révéler ma cache pas cachée de mes « saloperies de twinkie » comme Max dit. Mate cette collection de twinkies Em, c’est pas beau franchement ?
— Tu caches bien tes secrets, tu vas tous les manger avant qu’il rentre et remettre des carottes à la place après ? »

ø

JUIN

Finalement, la vie avec Emerson s’articule tranquillement. On a facilement et rapidement trouvé notre rythme. J’attends que mon mec sorte pour lui présenter. Alors que la deadline est censée arriver, on cherche une maison. On a décidé de vivre tous les deux, mon boulot et celui qu’il a trouvé dans un truc de fast-food en attendant nous laisse la possibilité de vivre dans un petit truc. A deux. Parce qu’on s’est dit que ce serait sympa de retrouver un foyer. Et je dois quitter Downtown, Matthew. Me rapprocher de Max, de Kurt, de mon chien, rester dans le West Side. Les coins sont sympas en réalité. La présence de mon frère me permet d’être moins sur les nerfs quant à la date de sortie jusque-là indéfinie de Maximilian. Quand ça va pas trop il est là, quand il se sent pas à l’aise je fais en sorte d’améliorer les choses pour lui. Il est facile à vivre, silencieux, tranquille. On n’a pas encore discuté des sujets qui fâchent, des choses qu’ont a derrière les yeux quand on s’observe le matin en silence, posés sur l’ilot de la cuisine de Max. Mais ça viendra. On se laisse juste le temps de s’apprivoiser.
Je suis contente que Madmax nous ai laissé sa baraque. Ça nous aide, vraiment. J’essaie de prendre le meilleur de la situation pour contrebalancer le pire. Mon job au Homewrecker bon, même si c’est safe… J’aime pas trop bosser là-bas. James est hyper cool évidemment et j’ai pas de problème mais la prostitution (parce qu’on parle de ça) c’est vraiment un truc à part. Néanmoins, s’ils voulaient me mettre à l’épreuve quant à savoir si je sais fermer ma bouche, et bien, ça marche. Ils savent maintenant.

ø

« Williams ? »

Je lève mon grand corps du canapé, habillée, prête à partir, dans l’attente de James cette fois qui a décidé d’aller voir les gars. C’est bien parce qu’on mutualise toujours nos trajets, parfois c’est l’un, parfois l’autre, on finit par s’accorder et puis si j’ai envie j’y vais toute seule mais c’est plus fun d’aller en prison à deux que tout seul j’ai envie de dire. J’ai pas emmené Emerson évidemment, pas encore. Sauf que la voix de l’autre côté de la porte n’est pas masculine et je l’apprécie pas beaucoup en réalité mais bon, je me tiens à carreau, trottine pour arriver à la porte de chez Max et ouvre le battant en bois sur la silhouette au carré de la matriarche du club.

« Alma. Je lui adresse un sourire, ne sait pas trop sur quel pied danser, si je dois m’avancer, lui faire la bise, lui serrer la main, lui donner un sucre et des vitamines en vue de la gueule de déterrée qu’elle se tape malgré le fard qui est parfaitement étalé sur ses joues. Je veux dire, n’importe qui de censé doit bien les marques du manque de sommeil sur son visage, son éclat est éteint, la couleur de sa peau pas particulièrement ravivée par le maquillage. Si j’ai l’habitude qu’elle soit froide, je n’ai pas l’habitude de la voir… malade ? fatiguée ? J’sais pas trop.
— James nous doit nous rejoindre à la prison. Elle coupe dans le lard direct quoi, comme d’hab, je suis plus choquée. Il m’a prévenu qu’il devait t’emmener au passage, je prends sa place. Allons-y ? » Elle me présente d’un revers de main la rue et je ne bronche pas davantage, me contente de me baisser, récupérer mes affaires préparées (c’est-à-dire en vue du temps simplement mes lunettes de soleil, mon sac à main et mes clefs) et de sortir de la maison vide pour la suivre, déjà partie en direction de sa voiture. « On prend ma voiture, sweetheart. » J’avais pas deviné tiens, je me doute qu’elle se fout de ma vieille bagnole de moyenne classe. Mais je me contente d’acquiescer alors qu’elle place aussi ses lunettes de soleil sur son nez et ouvre sa voiture de loin, garée à quelques minutes.

Le trajet se fait dans le plus grand silence, j’ai essayé de lancer un peu la conversation mais la matriarche n’a pas l’air vraiment concentrée. Enfin, pas sur moi en tout cas, mais son regard derrière ses lunettes guette la route. Elle va vite, et je me surprends parfois à appuyer sur le plancher d’un pied censé presser le frein. Mais je ne dis rien. Elle m’a l’air bizarre. Presque… abattue, moins méchante. Bon. Je sais qu’il s’est passé des choses au sein des KOS, des choses majeures. Mais… je sais pas. Alors qu’on se gare sur le parking de la prison, je m’attends à ce qu’elle déverrouille les portes dans la foulée mais rien. Alors je me tourne vers elle pour la trouver à moitié tournée vers moi, les cheveux relevés par la paire de lunettes qu’elle a repoussé sur son crâne.

« Judith. Je n’ai pas eu le temps de m’occuper de discuter avec toi jusque-là, autrement que quelques minutes par-ci par-là. J’enlève mes lunettes pour ne pas paraître impolie et lui rend un regard perplexe mais attentif. C’est pire sa gueule à la lumière amoindrie de l’habitacle, ses vitres sont teintées, le plafond béton du parking lui donne un teint cireux. Je ne dis rien. Ça fait un moment que Maximilian m’a mis au courant de ton cas. Ah. Une enclume retombe dans mon estomac. J’avais oublié ce petit détail et à vrai dire, comme ai-je pu. Elle n’a rien laissé paraître ceci dit et ça m’était passé complètement au-dessus de la tête. Je sais pas. En tout cas, je n’ajoute rien de plus, me contente de laisser glisser mes doigts autour de ma paire de lunette, un peu nerveuse. Tant que tu ne dis rien, ça devrait aller. Mais je ne t’apprends rien. Avoir les détails en ma possession me permettront de gérer si jamais, mais y’a pas de raison que ça sorte, t’as pas eu de chances, ça arrive. On n’en parlera jamais sauf si ça revient sur la table. En revanche, si ton petit secret est découvert par une troisième personne il faudra que tu saches comment réagir. Et c’est pareil pour ton frère, n’est-ce pas ? J’espère que votre version est solide.
— Rôdée. Cette fois, c’est sur, je me permets de lui répondre. On est sur la même longueur d’onde, et elle n’a même pas conscience à quel point. Même Emerson n’est pas au courant de tous les détails. Elle me détaille d’un air toujours aussi dur, j’ai l’habitude maintenant mais je joue son jeu sans trop m’écraser, comme prévu.
— Rentrer dans cette famille, Judith, n’est pas donné à tout le monde. Et la loyauté est primordiale. Ton petit secret n’en restera un que si tu continues ce que t’as bien commencé avec le Crashdown. Cette fois, son ton bien que tout aussi doux que tout à l’heure me donne quand même une information bien différente. Je savais qu’elle n’hésiterait pas à utiliser ses informations dans le cas où je sortirais du droit chemin, mais j’en ai la confirmation. J’ai l’impression de la voir sous un nouveau jour. J’acquiesce. Jusque-là t’as fais ce qu’il fallait. Il vaut mieux pour tout le monde que ça continue dans ce sens-là. On se comprend ?
— On s’comprend. Elle m’adresse un mince sourire qui n’a rien de vraiment aimable on dirait une formalité administrative.
— Bien. Alors je te dis pas encore bienvenue dans la famille, mais continue ce que tu fais avec Max. »  Je l’observe se détourner de la conversation aussi vite qu’elle a décidé que ça s’arrête là. Elle replace ses lunettes, déverrouille les portes et c’est parti pour faire un aller en prison. Pas loin, James est adossé à sa bécane et penché sur son téléphone. Dès que les talons de la matriarche résonnent sur le béton, il relève la tête comme habitué au son. Je m’approche de lui et le salue, tandis qu’Alma part en tête, le bras agrippé autour de la lanière en cuir de son sac. James baisse un peu le ton :

« Ça a été ?
— Oui. Il m’adresse un sourire malin. Mais oui, pourquoi ça irait pas.
— Bah, elle est pas facile, c’est mieux pour nous. Madmax t’a déjà fait l’topo j’imagine.
— Crois-moi, plus d’une fois. » Ça le fait marrer alors que je soupire et qu’on s’engouffre par la porte du sous-sol, que la matriarche nous tient, droite comme un piquet. Je les laisse parler dans les escaliers, visiblement habitués à la compagnie l’un de l’autre. Ça me laisse perplexe, toute cette histoire.

ø

FIN JUILLET

« Deux pièces, comme demandé, grand espace dans le salon, baie vitrée directe sur le jardin… » Je traine dans le salon, le bras enroulé autour de celui de mon frère qui lui aussi tient la tête en l’air comme si on cherchait les défauts de cette énième maison que l’on visite. Ça fait un moment qu’on cherche maintenant. Et jusque-là, je crois que rien ne m’avait plus comme celle-ci.

« La cuisine est derrière vous. Vous avez un étapes pour les deux chambres et la salle de bain. » Je fais un demi-tour, aperçoit la cuisine séparée. La sonnerie d’un téléphone sonne et c’est l’agent qui s’excuse. « Je vous laisse faire un tour, je m’excuse je dois absolument répondre. » Emerson répond à ma place qu’il n’y a pas de problème.

On se sépare, sans un mot encore et chacun de notre côté nous faisons notre tour et découvrons petit à petit l’espace. C’est pas très grand, je veux dire on n’a pas non plus vingt mille euros à mettre dans une maison par mois mais c’est bien, je veux dire, c’est largement suffisant. Je jette un œil à la cuisine, passe à la buanderie, puis monte les escaliers pour aller faire un tour au niveau des chambres. Une trappe : un grenier.

Lorsque je redescends les escaliers, je retrouve mon frère au milieu du jardin derrière la maison qui observe les alentours. Il semble faire attention aux bruits, lunettes de soleil juchées s’arrête du nez.

« Alors ? Il m’entend passer la baie vitrée et le rejoindre.
— Hm… Je me retourne jette un œil à l’intérieur depuis le jardin. Il m’est facile de me projeter dans le salon, ça me paraît étrangement familier et je juge que c’est bon signe. Je crois que jusqu’à maintenant c’est celle que je préfère.
— Moi aussi. Je l’observe, ça y’est l’excitation prends place dans ma tête alors que j’entrevois nettement ce que pourrait être notre vie ici. Tu veux refaire un tour à deux ?
— Ouais on peut faire ça. Je crois que ça me plait bien, à priori c’est celle qui en terme de place nous irait le mieux. Et c’est un peu plus loin que prévu mais bon y’a la bagnole alors…
— Hm, ouais. »

On décide de refaire un tour et cette fois on échange davantage, on visualise, on se projette. Même lui qui est de nature tranquille et silencieuse me semble emballé et ça me fait chaud au cœur, de le voir se visualiser ici avec moi.
Lorsqu’il est l’heure de finir la visité, Emerson et moi semblons plus ou moins d’accord. Alors qu’il discute avec l’agent sur le perron juste avant notre départ, lui indiquant que nous prenons quelques jours de réflexions, moi, je m’éloigne alors que c’est au tour de mon téléphone de sonner. Un nom que je n’ai pas l’habitude de lire sur mon écran s’affiche et je ne laisse pas plus d’une séquence avant de répondre.

« Alma ?
— Bonne nouvelle, Judith. »


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