Nouveau départ - ft Alexeï

Nouveau départ

C’est un jour un peu particulier aujourd’hui. Un peu comme mon premier jour, il y a de cela deux mois maintenant. Je me regarde dans la glace de la salle de bain et… je ne suis pas sûr d’aimer ce que je vois. J’ai mal dormi, trop de questions sont venu me hanter. Travailler en équipes ne m’a jamais dérangé, mais là, ce n’est pas pareil. On m’a prévenu, il y a quelques jours. Je vais avoir une coéquipière. Elle revient après un congé de six mois. Je remplace son équipier, décédé en mission. Je ne sais rien de plus. Enfin, je connais son nom. Après tout nos bureaux sont l’un en face de l’autre. Non ce qui me dérange, c’est que je me demande si j’arriverais à faire à nouveau confiance à quelqu’un. Il faudra bien, je me doute. Mais, après ce qui s’est passé début d’année…

Je ne me sors pas de la tête que j’aurais dû voir quelques choses. J’aurais dû me rendre compte de ce que faisait mon équipier. J’ai l’impression que j’ai échoué, que je ne suis plus aussi doué qu’avant. Mais ais-je vraiment été doué une fois ? Je chasse cette question qui ne mène à rien avec un grand jet d’eau froide sur le visage et me sèche avant d’enfiler ma chemise. Ça va, habillé, je ne fais pas trop pitié. Je sors ensuite de la pièce et retourne dans la chambre où m’attendent arme et plaque. Les pièces sont encore presque vides, je n’ai emménagé que récemment et… disons que je n’ai pas vidé la maison de mon ex-femme. Alors pour le moment, j’ai le minimum. On verra bien au fur et à mesure. J’ai de quoi vivre et accueillir les garçons, pendant les vacances de Noël, si nos projets se maintiennent.

Une fois prêt, je me dirige vers le garage, sans oublier de prendre mon casque. Je n’ai pas la moto aujourd’hui, je l’ai laissé au garage du poste central pour qu’ils vérifie la radio, installée il y a deux mois. Comme je n’ai pas de voiture, j’ai demandé à ce qu’elle soit équipée. Et hier, je l'ai laissé en révision. Alors en attendant, j’ai pris la voiture qui m’a était allouée pour le travail. Je commence à me faire à la ville et je trouve de plus en plus mes marques. Mes trajets sont donc plus agréables, je ne crains pas de me perdre à chaque bifurcation. Cette fois, j’arrive même un peu en avance, avant ma prise de service. J’en profite donc pour passer voir la moto. Heureusement, elle est assez large et installer la radio n’a pas été trop compliqué. Je profite donc pour aller la garer sur le parking, histoire de ne pas encombrer le garage.

Finalement, je finis par rejoindre les bureaux. Il est temps de rencontrer la femme avec qui je vais faire équipe. J’appréhende un petit peu, mais c’est normal, il me semble. Seulement, je ne peux m’empêcher de revêtir une fois de plus l’armure que je porte en quasi-permanence. Une fois dans l’open space je la repère sans problème. C’est facile en même temps, je sais où regarder. Il ne me faut alors que parcourir quelques mètres avant d’être devant elle. J’ai un peu de mal à me faire une idée comme ça, elle est assise à son bureau et puis semble perdue dans ses pensées. J’ai connu le fait de devoir partir pendant plusieurs mois avant de revenir, c’est compliqué. Mais je ne sais pas toute l’histoire alors je ne peux pas juger, puis je n’aime pas ça. Les Hommes sont trop compliqués pour cela.

Quelques pas de plus et me voilà devant les bureaux, elle ne semble pas m’avoir vu et sursaute comme je pose mon casque sur le meuble. Je l’observe un instant, mais je ne parviens pas vraiment à me dire si on pourrait s’entendre ou pas. Je lui tends, dans le même temps, la main. « Alexeï. Je suis désolé, je ne voulais pas faire peur. » Voilà, pas de tu ou vous, je lui laisse le choix. Le vouvoiement ou le tutoiement. Après tout, c’est moi qui viens de débarquer dans le poste, qui remplace un collège. Puis je ne sais même pas si elle a eu des infos sur moi. Tout ça, on verra bien. Elle a peut-être besoin de temps, elle vient de revenir après tout.

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Alors va pour le tutoiement. Si elle est plus à l’aise avec, alors c’est comme elle veut. La femme me sert la main, une poignée de main franche, c’est déjà un bon point, se présentant à son tour avant que nous ne prenions place aux bureaux. Que je sois indulgent ? Pourquoi elle me le précise ? Enfin, je lui fais un signe de tête. « Bien sûr ! Tant fait pas pour ça. » Sans que je ne lui demande quoi que ce soit, elle m’explique la raison de son absence. En soit, je n’apprends pas grand-chose, mais je ne laisse rien transparaître. Je ne sais pas comment elle le prendrait de savoir que les chefs ont déjà balancé des infos. Elle me précise tout de même qu’il faisait équipe depuis une quinzaine d’années. Pensant, à tort ou à raison, qu’elle doit avoir le même âge que moi, ça veut dire qu’elle a toujours était avec lui.

Je reste silencieux, respectant ce qu’elle a vécu. Elle conclut alors en me disant qu’elle est apte à reprendre le travail et j’avoue que je suis un peu surpris. « Je m’en doute, bien. » Je ne sais pas vraiment comment je dois réagir à cela. J’espère bien qu’elle est revenue avec l’approbation des médecins. Surtout qu’elle a pas menti pour pouvoir revenir. Si jamais il y a un problème et qu’on découvre qu’elle a insisté pour bosser à nouveau. Beaucoup de monde serait dans la merde. Mais bon, pour le peu que j’ai vu pour le moment. Elle me semble solide. Je la laisse donc finir, me poser les questions qui lui viennent.

Seulement, le tutoiement, il n'y a pas de soucis, mais le diminutif. J’apprécie un peu moins. Je me crispe alors, un peu et ne réponds pas vraiment à sa demande quant au fait de pouvoir m’appeler Alex. Elle me demande ce qui m’amène et je pensais, j’aurais voulu en fait, que cette question vienne un peu plus tard. Même si, je savais pertinemment que je finirais par devoir y répondre. D’autant que si elle sait déjà, pour New York, pour les stups, qui me dit qu’elle n’est pas au courant de toute l’histoire. Me voilà donc devant un dilemme. Est-ce que je lui dis au risque de la rendre ultra méfiante à mon égard si elle ne savait rien, ou, est-ce que je ne dis rien et je prends le risque de la rendre méfiante quand même si elle sait tout.

Je soupire un instant en me reculant sur le fauteuil. Je prends une ou deux secondes pour me décider. « Ouais, j’étais aux stups là-bas. Mais je veux pas trop en parler. » Bon comme ça, soit elle sait et peut-être elle comprendra, soit elle ne sait pas, mais elle comprendra peut-être aussi. Je suis en forme aujourd’hui… Je pourrais me coller des baffes si je n’étais pas au milieu de l’open space. « En tout cas, comme pour toi. Pas de stress, je suis apte à bosser. » Je fixe un instant la photo de mes fils sur le bureau, prise juste avant que je parte pour Chicago. « Bref, je suis ici, maintenant. Je n’ai plus rien à New York, si ce n’est mes fils. » Il faut bien avouer que je n’ai pas vraiment envie de parler de ce qu’il s’est passé ici. On ne sait jamais. Je ne suis peut-être pas un bleu, mais je dois encore faire mes preuves. « En tout cas, ce que je peux te dire, c’est que je sais ce que cela fait, de se prendre une balle. Je sais que c’est dur de revenir. Alors, pas la peine de me mentir si à un moment ça ne va pas. On est d’accord ? »

Je lui laisse le temps de réagir. Il faut que je sache ce qu’elle sait, savoir comment je vais devoir lui présenter les choses. Je vais quand même pas balancer un ‘au fait, je sors de taule’, au milieu de la salle, si ?

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J’aurais dû m’en douter. Elle a perdu un équipier, un ami. Même si, de mon côté, j’ai aussi perdu des collègues, ils n’étaient pas aussi proches de moi que pour son cas. Je m’en veut un peu de l’avoir poussé à en parler, sans même vraiment le vouloir. Je voulais juste qu’elle sache que je suis de son côté et qu’elle peut se confier, si elle veut. Pas qu’elle se sente obligée. Après elle me rassure en me disant qu’elle comprend et qu’elle viendra me voir le cas échéant. Bien sûr, elle attend de même de ma part. C’est de bonne guerre. Alors je lui lance un petit signe de tête, assorti d’un sourire entendu.

Elle finit par rependre. Elle parle d’une petite fille de neuf ans et je ricane un peu quand elle évoque l’énergie des enfants de cet âge. Je ne peux confirmer et je me surprends même à revoir mes fils à huit ans. Anthony était un peu plus calme que son frère, mais en même temps, il n’avait même pas encore tout à fait neuf ans quand j’ai été blessé. Chris lui comprenait un peu moins la situation, alors il a été moins marqué. Du moins, c’est ce que je pense. C’est ce que j’espère au fond de moi. Qu’ils n’aient pas été trop choqué. Mais ces réflexions ne durent pas vraiment comme elle me sort de mes pensées en me précisant que sa fille n’a jamais connu son père. Je respecte encore une fois le petit silence qui suit sa phrase.

Stevie me confirme ce que je ressentais, les relations humaines c’est pas son truc. Faut dire que je suis un peu dans le même cas. Mais elle a raison sur un point essentiel. On va devoir se supporter pendant un bout de temps. « Le plus longtemps possible, j’espère. » Je reste un instant silencieux avant de me lever et de lui faire un signe de tête en direction du coin café. « Je vais me prendre un café, t’en veux un ? » Je lui laisse le temps de me répondre et me rends à la cafetière pour le réapprovisionnement. Personnellement, je ne pense pas pouvoir passer une journée de travail sans café. Et je suis plutôt content de voir qu’elle en boit aussi. Ça m’aurait vraiment fait bizarre de devoir travaillé avec quelqu’un qui n’en boit pas une goûte. C’est idiot, mais bon chacun ses petites manies.

Je reviens donc avec deux tasses et en pose sur son bureau avant de reprendre place au mien. « Je vais pas te mentir, j’ai pas perdu d’équipier, pas vraiment en tout cas. Alors je sais pas ce que cela fait exactement. Mais j’ai perdu des collègues, avant même de devenir inspecteur d’ailleurs. » Je marque un temps d’arrêt. Le 11 septembre est encore frai dans les esprit, même avec les années. Surtout chez les agents du NYPD. Je bois une gorgée avant de reprendre. « En fait… je vais pas tout expliquer, pas ici. Mais disons que si je paraît froid, c’est juste que j’ai pas envie de revivre certaines expériences, alors ne le prend pas pour toi. Je t’expliquerai peut-être un jour, mais pas temps que j’aurais pas fait mes preuves. Je suis arrivé qu’en août donc… il faut encore un peu de temps. »

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Alors que j’entends son ventre gargouiller, je sors une boîte de biscuit du tiroir de mon bureau et la pose près du sien. D’un signe de la main, je l’invite à en prendre et me sers sans plus attendre. Toujours avoir de quoi manger. C’est la base. En tout cas, elle comprend mon point de vue et cela me rassure. Elle ne croit pas si bien dire, quand elle avance qu’on en a bavé tout les deux. Au moins elle ne me harcèlera pas pour connaître la vérité. Ce qu’elle dit ensuite me plaît un peu moins par contre. Elle me parle de lever le voile sur sa propre affaire. Seulement, c’est risqué et je ne suis pas sûr que ceux qui en ont la charge ou même les chefs soient vraiment d’accord avec ça. D’autant qu’elle me précise bien que cela va être risqué.

Finalement, j’ai le droit à un ‘je sais pas pourquoi je te le dis’ qui me paraît, bizarre. Je comprends le fait qu’elle ne veuille pas de non-dits, mais là, c’est un peu trop, je trouve. Bref, elle me demande juste de lui dire si je ne veux pas d’ennui. Nos premiers échanges avaient tellement bien commencé… Mon visage se ferme un instant comme je réfléchis à toute vitesse. « Écoute… je ne veux pas avoir l’air de m’en foutre, mais… » Je jette un coup d’œil à l’open space avant de continuer. « Je suis pas encore fondu dans le décor, je risque juste de t’attirer des emmerdes. Je conçois que tu veuilles savoir ce qu’il s’est passé exactement, mais c’est pas bon. Tu devrais pas t’en mêler. » Bien sûr, je fais attention à ne pas parler trop fort, heureusement l’heure fait qu’il n’y a pas encore tout le monde.

Je pose alors la tasse de café, que j’avais encore dans les mains et passe ses dernières sur mon visage. « Je sors juste de Ri… » Je me fige un instant et me colle une grande claque mentale. Faut que je fasse gaffe. « Je suis ici parce que le NYPD m’en devait une. J’ai pas envie de perdre ma plaque. Alors on va être clair, je ne t’empêcherai pas de chercher la merde, mais je ne t’aiderai que si tu es honnête avec moi. Mon ancien partenaire m’a, disons, quelque peu déçu, alors j’ai pas l’intention de me faire avoir une deuxième fois. » Je tends la main vers elle. « Deal ? »

Pour l’instant, la balle, si je puis dire, est dans son camp. Soit elle promet de tout me dire et là, je l’aiderai, sauf si elle me demande de devenir un ripou, soit elle n’en sera pas capable et notre collaboration risque d’en pâtir. Maintenant, je ne sais pas pourquoi, mais j’ai l’impression que je peux avoir confiance en son honnêteté. Après, faudra que j’en sois digne.

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Deal. Parfais, je viens à peine d’arriver, il y a deux mois seulement, que je commence à me mettre dans la panade. Je lui lance un sourire entendu et la regarde prendre une feuille et noter quelques lignes dessus. Je me dis, finalement, que j’aurais pu être dans son cas. Je me suis jamais renseigné sur ce qu’il s’est réellement passé le 17 juin 2011. Machinalement, je viens poser une main sur mon flan, là où je porte encore une des cicatrices de ce jour tandis qu’elle fait glisser la feuille vers moi. Je lis ses mots un peu surpris. Je pensais pas à un truc comme ça. En effet, c’est plus que risqué là. Je plie la feuille et la glisse dans mon blouson, que je n’ai toujours pas enlevé d’ailleurs. Je la détruirais chez moi, histoire de ne pas laisser de trace au bureau. Si jamais ces accusations se révèlent exactes et qu’il avait un complice, nous devrons faire preuve d’extrême prudence.

Je me demande alors ce que je vais lui dire sur moi. Si elle apprend ce qu’il s’est passé, elle risque de ne pas me faire confiance. Mais je n'ai pas vraiment envie de le lui dire. Je remarque alors qu’il manque quelque chose sur mon bureau, en tournant la tête et sort d’un des tiroirs une peluche de panda. Le genre avec les grands yeux. Je sais que cela fait bizarre venant d’un mec comme moi, le genre froid et sans émotion. Mais c’est mon fils qui me l’a donné. Il voulait l’offrir à une fille qu’il aime bien, mais quand je suis parti, il a préféré me la donner à moi, pour que je pense à eux, comme si je pouvais les oublier. Mais c’est mignon, faut bien l’avouer, alors je la garde précieusement et la pose tous les jours derrière leur photo.

Au moins, j’ai pu réfléchir un peu à la question de savoir si je lui balance tout ou pas. Je bois une gorgée de café et ferme les yeux un instant avant de prendre une grande inspiration et de me lancer. Elle m’a fait confiance, elle m’a donnée des infos qui pourraient se retourner contre elle. Je lui dois au moins la même honnêteté. Je baisse tout de même les yeux en commençant à parler un peu plus bas. « Je sors de Rikers. » Voilà, au moins je n’ai plus le choix, je suis obligé de tout lui expliquer. « Début 2017, de la came a commencé à disparaître des scellés. Les affaires internes ont enquêté, encore et encore, sans rien trouver. » Je relève alors la tête vers elle, essayant de faire abstraction de sa réaction. « En mars de cette année, ils sont arrivés un jour au bureau et m’ont embarqué devant tous les collègues. » Je me crispe un peu, revoyant la réaction des gars de l’unité, c’était terrible à voir, une telle déception, mélangée à de la colère ou même de la haine pour certain. « J’ai pas arrêté de dire que j’avais rien à voir avec ça, mais j’ai quand même été mis en détention provisoire. Puis un jour, fin juillet, mon chef et le gars des affaires internes ont débarqué à la prison pour me dire que bah non ce n'était pas moi… Je te laisse deviner qui s’était. »

Ma mâchoire se crispe encore plus, à en craquer un peu. Je suis d’un naturel calme, j’ai pas mal de sang-froid, mais quand je repense à ce type, que je prenais pour un ami, j’ai envie de lui exploser la tronche. Je soupire avant de finir mon histoire. « Je suis sortie quelques jours après et… Je suis pas retourné au bureau. J’ai été réintégré dans la foulée, mais je pouvais pas y retourner. C’était trop compliqué. Ma femme avait demandé le divorce à cause de cette histoire, même si on y pensait déjà. Elle a accepté que je vive avec elle et mes fils le temps que je trouve un logement, mais… finalement, j’ai obtenu la mutation que je voulais. J’avais besoin de partir, de m’éloigner de New York. Mes garçons me manquent, mais ça vaut mieux. Du coup, me voilà, depuis août. »

Je la regarde alors vraiment, tentant de comprendre ce qu’elle en pense, espérant qu’elle ne va pas m’en vouloir. Au pire, elle pourra demander à changer de partenaire, je ne lui en tiendrais pas rigueur et son secret sera bien gardé quoiqu’il arrive...

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J’avoue que je ne m’attendais pas à ce qu’elle me prenne la main. Je me retiens de ne pas la retirer, de peur de la froisser. Elle ne semble pas m’en vouloir, alors je ne vais pas la rejeter. Je ricane quand elle me parle d’injustice. « Injuste ? C’est peu de le dire. » Malgré tout, elle me dit qu’elle est heureuse de m’avoir comme équipier, avant de me lâcher la main et de regarder sa montre. Stevie me propose d’aller boire un verre un de ses soirs, histoire de parler un peu plus tranquillement de cela, ou juste pour nous détendre. C’est pas une mauvaise idée. « C’est, vrai, on fait bien la paire. » On regarde l’open space, se remplissant petit à petit. L’heure avance doucement, mais sûrement.

« Ouais, on ferait mieux d’y aller, vas-y, garde moi une place, je te rejoins. » Je n’attends pas vraiment de réflexions de sa part. Je me lève et me dirige vers les toilettes. Il faut que je me calme, parlait de ce qui c’est passé, ça m’a plus secoué que ce que je pensais. Reconnaître qu’on s’est fait avoir, qu’on a pas su découvrir le double jeu de son collègue le plus proche. Je me passe de l’eau sur le visage et tente de me calmer comme je peux. Je tourne en rond un instant, avant de donner un grand coup dans le mur, réalisant soudain que l’injustice dont j’ai été victime pourrait arriver à ma nouvelle équipière. Au bien, sûr je me fais mal à la main, mais peu importe. Au moins cela me sort de mes pensées et je pars la rejoindre dans la salle de réunion.

En effet, il commence à y avoir quelques personnes. Je soupçonne que Stevie va avoir un bon accueil. Du moins, je l’espère pour elle. Je me souviens encore de mon retour après ma blessure, quoi que moi, je n’avais pas perdu de collègue à ce moment, heureusement, plusieurs blessé parmi les agents, mais pas de morts. Là, les circonstances sont un peu particulières. Mais il ne faudrait pas que sa blessure soit occultée par le décès de son équipier. En tout cas, pour l’instant j’essaie surtout de voir la réaction des autres, si je dois l’aider dans son enquête, autant commencer maintenant, discrètement. Puis j’ai un regard neutre sur les collègues, alors autant profiter un maximum. Je reste debout derrière elle, finalement. Un peu comme une ombre, une ombre froide, comme pour le coup, je reprends mon visage impassible. Comme on dit, que le jeu commence...

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J’ai bien vu qu’elle parlait avec la psy de la division. J’ai du la voir une fois. Normalement, un peu plus, comme je ''reprends'' le travail après plusieurs mois de prison. Sauf que je déteste ça, alors j’ai arrêté d’y aller. Je me prends donc un regard réprobateur, si je puis dire, quand elle passe à mon niveau pour aller rejoindre sa place. Moi je me glisse aux côtés de Stevie comme elle se tourne vers moi. Selon elle, beaucoup la soupçonnent et je peux la comprendre. Je n’ai pas revu mes collègues de New York, alors je peux pas dire comment ils m’auraient accueilli. Mais je me mets à sa place. Je lève les yeux au ciel comme elle me parle de ne pas avoir misé sur le bon cheval. J’allais lui répondre quand elle me dit qu’elle comprendrait si je voulais changer de partenaire. « Non, mais t’as prit une balle ou un coup sur la tête ? »

Je me suis retourné vers elle, en chuchotant. « C’est hors de question que je change. Après ce qu’on vient de se dire ? » Je ne peux rien dire de plus que la réunion commence, répartition des affaires et tout le blabla habituel. Dieu, que je hais ces réunions. C’est une perte de temps sans nom. J’écoute d’une oreille distraite, pensant aux dernières minutes qui se sont écoulées. À ce que j’ai dit, comment j’aurais du présenter les choses. Puis, je ne lui ai pas parlé de ce qu’il s’est passé à Rikers. Je lui raconterais peut-être, si elle me demande des précisions, ou si elle regarde le dossier. Parce que oui, même si j’ai été parfaitement innocenté, j’ai un dossier de l’administration pénitentiaire. Que je fais tout pour cacher d’ailleurs.

Enfin, la question ne se pose pas, pas encore du moins. Alors je me concentre à nouveau sur la réunion et lorsque tout le monde commence à se disperser, j’attends un instant que Stevie réagisse. Seulement, elle ne réagit pas vraiment comme je m’y attendais. La voilà qu’elle me fait une remarque sur ma main. Comment elle peut savoir ? Je baisse alors les yeux sur ma main droite et la cache machinalement, bien que trop tard, avec la gauche. « Rien… je… c’est rien. » Cette fois, elle n’aura pas plus d’info. J’ai une réputation à maintenir, et même moi, j’en reviens pas d’avoir craqué. Je me lève alors, retournant vers nos bureaux. C’est que nous avons une longue journée qui nous attend. Un de ses soirs, on ira boire un verre. Je lui laisse, l’honneur de choisir quand et où...