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 Tomorrow Never Came - Tomislav

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Ayleen McKinney

Ayleen McKinney
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quartier : South Side - Un studio au dessus d'un restaurant chinois avec son époux mais plus pour très longtemps
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MessageSujet: Tomorrow Never Came - Tomislav   Tomorrow Never Came - Tomislav EmptyMer 9 Aoû - 22:13

Tomorrow Never Came
Tomislav & Ayleen

Hey, what you doing ? Not a lot. Shaking and moving in a local spot. Baby don't asky me why, don't ask me why

Le grésillement sourd du tourne disque s'amenuise, se bloque et se répète. Il s'effrite, se racle contre la tête de lecture, éreinte les fins sillons noirs, accompagnant le rythme régulier d'une respiration lente et douloureuse. La trompette et le sax' pincent l'air dans les narines, la basse soulève la cage thoracique, la batterie fait sautiller un cœur qui se fatigue, s'épuise et se stop parfois. La mélodie court sur les motifs floraux des papiers peints, jaunis par le temps ; elle longes les arabesques des tapisseries poussiéreuses, les dents et les poils fins des animaux exotiques empaillés ; elle s'imprime dans les fêlures des porcelaines d'orient et dans les craquelures des vases d'occident. Le jazz dans son entièreté s'imprime dans absolument tous les recoins d'un salon aux couleurs criardes et dépareillées. Il s'éparpille et fait vivre dans son allégresse quasi centenaire un corps qui se meurt. A petit feu, au son des groupes de Harlem et de la Nouvelle Orléans, Ayleen s'éteint, jour après jour, d'heures en heures. Au son du blues et des gospels, dans la mesure des pianos et des voix soûls de ces grandes dames pleine d'énergie, Ayleen s'enfonce et s'enlise dans la mousse orangée et molle d'un canapé seventies bon marché, écorché qui épouse la cambrure maigre de son dos depuis plus d'une semaine. Devant ses yeux cernés d'un violet noirci et profond, se déroule la pellicule primaire d'un vieux film en noir et blanc. Dans un rire mutin, la blonde au premier plan se ressert un troisième verre de champagne plein de bulles qui dansent. Elle l'avale, hilare, soutenue par le charme d'un gentleman gominé, la main appuyée sur le comptoir d'un bar, qui n'ose dévier vers la cambrure des reins féminins qui provoquent plus qu'ils ne séduisent. Les hommes à leurs côtés poussent leurs jetons au milieu de la table grise, demandant à la blonde dans sa grande et longue robe brillante de souffler sa chance sur ces vulgaires bouts de plastiques qu'ils se disputent, porteurs de richesse. Ayleen les contemple, un peu envieuse dans leur époque joyeuse, dans leurs années folles. Elle appuie machinalement sur l'épaisseur de ses cheveux sales, s'imaginant avec une coupe aussi courte et lisse que cette dame pleine de grâce et de candeur. Bof, ça n'irait peut être pas, elle se dit que c'est peut être le bandeau orné d'une plume qui fait tout en réalité. Reniflant, elle réajuste les fils de Billy qui s'emmêlent autour de son bras frêle et puis continue de contempler ces personnages qui rient, jouent, s'amusent et exultent ; ces personnages qui respirent. Leurs poumons se vident, l'air y entre et ressort sans qu'ils ne se posent aucune question, aucune. Leur oxygène passé est une provocation à son malheur présent et elle tousse encore une fois, inconsciemment devant ça. Ça, ce marasme ambiant qui l'habite, qui ne la quitte plus depuis qu'elle sait ce qui l'attend dans moins de deux mois : ça, ce marasme qui reste et qui l'accompagnera derrière cette porte d'entrée close, derrière les murs blancs et désaffectés de l’hôpital, derrière les parois de bois de son propre cercueil.
« Et des ravioles aux noix ! Des ravioles aux noix pour la table une, pour une charmante demoiselle qui devrait passer à la douche après son délicieux repas préparé avec amour ! » Son père adoptif se ramène, cet éternel ensemble de velours scotché à sa maigre silhouette qui se dandine et dépose un plateau odorant sur les genoux pliés couverts d'un plaid et de ses rats qui s'agitent lorsqu'ils hument la nourriture. L’œil morne et découragé mais la mine joviale et forcée il attend l'habituel refus qui tombe presque immédiatement d'une voix à moitié chuchotée. « Merci mais j'ai pas très faim. » Se penchant à la hauteur de la malade, il capture quelques pattes entre les pics de la fourchette et porte le tout dans sa propre bouche aux contours mal rasés. « Ils sont bons pourtant. Ça te dit qu'on fasse moitié moitié ? Aller, je vais quand même pas devoir repasser par ces boissons infectes et hyper-caloriques que je t’achetais quand tu étais petite pour que tu reprennes un peu de poids ? » Haussant les épaules Ayleen se redresse un peu, acceptant difficilement d'ouvrir la bouche, dégoûtée comme ces enfants devant une tonne de légume verts. « Oui, c'est vrai qu'ils sont bons, merci c'est gentil. » S'offrant le luxe de se forcer un peu pour éclairer le visage de cet homme qui dépéri autant qu'elle d'un simple regard porté sur sa personne, elle mange, sachant pertinemment que dans quelques heures le tout finira au fond des toilettes. « Tu devrais te laver un peu Ayleen, ça fait plusieurs jours que tu ne bouges plus de là. Tu devrais sortir, voir tes amis, aller au café comme tu fais normalement, au musée je sais pas. » Le regard chocolat se porte sur les tâches indélébiles du plafond, agacé. « Je veux voir personne, pas comme ça, je veux plus voir personne. » Se faisant violence pour que les larmes qui menacent de sortir restent à l'intérieur de ses prunelles, elle maintient sa tête ainsi levée, froissant les plis de son jogging jusqu'à ce que l'on sonne plusieurs fois d'affilé chez eux. Maintenant sa position, Ayleen résiste, laisse la gravité agir sur sa tristesse tandis que le cuir d'une semelle usée crisse contre le bois sale du parquet de la pièce. Une voix grave, froide teintée d'un accent marqué s'élève alors, lui demandant si elle compte rester ainsi longtemps. Boudeuse, la sylphide baisse le menton à hauteur normale, dévisageant l'invité surprise qui vient de débarquer. Tout de noir vêtu, Tom se tient dans l'encadrement de la porte, le visage toujours impassible, bizarre, détaché, hors du monde. Comme d'habitude. « Ah, c'est toi weirdo. » Un pouffement presque imperceptible secoue ses larges épaules tandis qu'il se tient toujours droit, raide comme la longue tige de fer qui peut rivaliser avec l’épaisseur ridicule de sa silhouette. Il ne bouge pas, il reste planté là ses gros yeux de défoncé braqués sur elle, activant sa moue rosée pour la prévenir que sa voiture est enfin réparée. Prenant la plus grande inspiration que ses poumons lui permettent de prendre, Ayleen dépose la voûte de ses pieds nus au sol avant d'enfiler ses chaussons à tête de licorne. Déposant ses petits compagnons sur ses épaules elle se décide enfin à se lever, traînant Billy derrière elle dans un bruit de roulettes rouillées pour aller contempler le résultat. « Je te dois combien du coup ? Ne t'approche pas trop de moi déjà parce que je ne veux pas que tu manges un de mes rats et ensuite parce que je suis vraiment dégueu. »

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MessageSujet: Re: Tomorrow Never Came - Tomislav   Tomorrow Never Came - Tomislav EmptyMar 5 Sep - 18:13


Ayleen & Tomislav // Tomorrow never came
⚜ Ce que l'on fait dans sa vie résonne dans l'éternité.⚜

Il s’applique à la tâche, concentré sur son job comme il le fait depuis ses 14 ans, sans broncher. Seul. Surtout seul. L’esprit d’équipe, c’est pas trop son truc, il préfère faire le taff lui-même, si jamais une bourde est faite il ne pourra s’en prendre qu’à lui-même. Mais vu qu’il est doué dans ce qu’il fait, des bourdes, il n’y en a quasi jamais. De vieux écouteurs salit de cambouis et de poussière vissés dans ses oreilles, Tomislav apprécie la musique qui s’étiole au creux de ses tympans. C’est cette nana rachitique qui lui a fait découvrir deux trois trucs de musiques classiques et de fil en aiguille, il s’est doucement dirigé vers les musiques de films qu’il n’a jamais vu mais dont il apprécie les sons à la fois doux, mystérieux et brutaux. Il y en a pour tous les goûts. Pour tous SES goûts à lui. Il se surprend même à mieux bosser dans ces conditions, avec pour seule compagnie les notes de musique qui le transporte un jour vers les contrées d’avatar pour le guider le lendemain dans les arènes poussiéreuses et sanguinolentes de Gladiator.
Depuis qu’il a foutu un pied à Chicago, Tomislav découvre la vie, la vraie. Loin de sa pauvreté même s’il ne baigne pas dans l’or et l’argent malgré toute la thune qu’il a bien soigneusement mit de côté. Il n’est pas con et surtout, il n’est pas irresponsable. S’il y a bien une chose dont il a su tiré profit de cette médiocrité et précarité qu’il a vécu dans son pays natale, c’est l’esprit de conservation mais surtout, le besoin urgent de s’assurer une certaine sécurité afin de ne plus jamais retomber dans cette misère qui a baignée toute son enfance.

Il inspecte une dernière fois les dessous de la bagnole avant de ressortir de son trou pour cette fois se pencher sur le moteur, vérifier les fonctions, les niveaux et tout ce qui constitue la bagnole. Il aime le travail bien fait et même si ce job lui a semblé pendant de longues années être ingrat à se salir les mains de la merde des autres, il se surprend à trouver à certains repos, de quoi atténuer parfois ses ombres qui lui tournent autour.

- Antonovic !

Le serbe se redresse et enlève un de ses écouteurs.

- Putain, ça fait 10 fois que je t’appelle !
- Désolé.
- T’as bientôt fini avec cette caisse ?
- Oui. Me reste quelques vérifications.
- Ok, grouille toi. Stevens ramène sa bécane, tu vas t’en charger et après tu ramèneras cette bagnole à sa proprio.

Il acquiesce sans broncher, digérant l’acide qui lui brûle la gorge d’entendre ce gros porc lui parler comme la dernière des merdes. Parce que ce job, il en a besoin. Pour s’intégrer et montrer aux administrations américaines qu’il n’est pas là pour exploiter le système.
Non, juste cette fameuse sœur qu’il ne tardera pas à rencontrer. Les informations de Maëve ont été plus que bénéfiques et utiles et Tomislav, après avoir aperçue cette fameuse Natalia sur son lieux de travail, s’apprête enfin à franchir le pas. Tâter le terrain, observer, jauger, affaiblir, sonder les failles et en retirer le meilleur qu’elle s’est approprié, à sa place.

Ce n’est que deux heures plus tard que Tomislav peut enfin se diriger dans son vestiaire et « profiter » de cette vieille douche déglinguée qui ne lui sert qu’une eau glaciale avec un sol où nous pourrions trouver un million d’espèce de champignon différent.
Cheveux mouillés et ramenés en arrière, il enfile un tee-shirt, sa veste et son jean, tous les trois noirs. Couleur du deuil. Presque de circonstance pour la personne qu’il s’apprête à aller voir. Il se met au volant de la bagnole de McKinney et en cours de route, se décide d’allumer l’autoradio pour lancer le disque qui y est déjà insérer.
Les premières notes s’élancent…

« Wake me up, before you go-go,
Don’t leave me hanging on like a yo-yo.
Wake me up, before you go-go,
I don’t want to miss it when you hit that high.
Wake me up, be….


- Shut the fuck up !

Yeux écarquillés, Tomislav éteint brutalement la musique agressive et surtout bien trop enjoué pour lui. Qu’est-ce que cette merde qui lui donne l’impression d’être aux pays des multiples couleurs sous l’emprise de LSD ? Putain, cette nana écoute vraiment des choses bizarres.
Certainement l’une des raisons pour lesquelles il se surprend à bien l’aimer.

- Oh tient, c’est le jeune Antonovic !
- Bonjour. Je viens ramener le voiture d’Ayleen.
- Déjà ? Vous avez fait vite.

Il hausse les épaules, esquisse un faible sourire pour les convenances et pour ne pas avoir l’air d’un type froid aux allures de psychopathes. Même si au fond, il s’en fout de savoir comment quiconque peut le percevoir.
Il laisse le père d’Ayleen le faire entrer aussitôt accueillit par son deuxième paternel.
Ouais en Amérique on a deux pères comme on pourrait avoir deux chiens. Ca ne le choc pas outre mesure, sachant pertinemment que l’homosexualité porte une autre liberté que dans son propre pays. Il ne sait pas pourquoi l’un des pères lui fait un rapide topo sur le morale de leur fille, sur ses conditions physiques et mentales déplorables mais aussi sur cette dépression qui semble repeindre les murs du salon en même temps qu’elle emmène la jeune femme en douceur vers la mort.
Tomislav pénètre dans la pièce, faisant grincer ses vieilles semelles sur le parquet bien trop neuf pour ce qu’il porte à ses pieds.

- Tu vas rester assise l’éternité ? Ou tu vas prendre le peine à dire bonjour.

Accent fort et singulier, américain encore imparfait mais Tomislav s’est amélioré au fil de ses fréquentations, en apprenant bien plus au creux des cuisses des prostitués qu’il paie parfois qu’en écoutant son connard de patron.

- Ah, c'est toi weirdo.

Elle a pris l’habitude de l’appeler comme ça, sous prétexte qu’il était un peu bizarre avec son visage froid et atypique. Il n’en tient pas rigueur, ayant face à lui une nana qui semble tout aussi borderline que lui en terme de particularité étrange. Comme ces rats qu’elle porte sur ses épaules, les choses étranges qu’elle aime, les objets qu’elle conserve.
Mains glissées dans les poches de son jean, le serbe ne bouge toujours pas fixant son regard implacable sur Ayleen dont il dépend une description étrange. Négligée. La jeune femme est assise, le corps glissé dans un vieux jogging et d’un haut qui laisse tout autant à désirer. Cheveux sales, visage amaigri, il ne peut pas louper les cernes qui ornent ses yeux clairs, presque éteint.
Tomislav pourrait presque apercevoir la mort qui l’attend, assise à ses côtés.

- Ton voiture est réparée. Je te l’ai ramené.  

Il l’observe toujours, se demande si elle va trouver la force de lui répondre, de respirer encore. Et ça lui fait quelque chose au creux du ventre malgré son expression totalement impassible.
Ayleen se redresse, respire et se glisse dans ses chaussons licornes qui est une faute de goût qui ferait presque sourire le serbe, trouvant ce quotidien pour le moins original. Et étrange.
Elle traine sa bouteille d’oxygène derrière elle comme l’on trainerait un fardeau, en silence, ses deux rats sur ses épaules.

- Je te dois combien du coup ? Ne t'approche pas trop de moi déjà parce que je ne veux pas que tu manges un de mes rats et ensuite parce que je suis vraiment dégueu.

Il la regarde lentement avancer.

- J’aime pas les rats.

Comme s’il en avait déjà goûter.

- J’préfère souris. Plus petite et facile à digérer.

Humour douteux qu’il lance d’un ton sérieux alors qu’il ne l’est pas. Tout est une question d’habitude avec le jeune homme. Jusqu’ici, il s’est construit un de ces masques hypocrites qu’il sert à toutes les sauces à tout le monde, histoire de dorée sa réputation, de se faciliter la tâche jusqu’au jour où il aura à faire à Natalia. Les sourires, l’air parfois penaud, le côté attendrissant et paumé… Tout ce qu’il n’est pas avec Ayleen, pouvant pour la première fois être simplement lui-même. Comme une délivrance.

- T’es pas dégueu, j’ai vu pire. Et avant qu’elle ne franchisse la porte du salon, il s’y positionne, toujours droit. Mais va prendre la douche quand même. Je n’arrive pas à savoir si c’est l’odeur de tes rats ou toi qui sens.

Taquinerie ou provocation, peut lui importe. Ce n’est pas parce qu’elle est malade qu’il se doit de prendre des pincettes avec elle, si ? Peut-être qu’Ayleen en a ras le bol qu’on la traite à la hauteur de sa fragilité, sachant déjà bien suffisamment qu’elle n’a pas la grande forme.

- En plus, faut que tu viennes avec moi. J’ai un truc à te montrer. On discutera le prix en même temps.

La façon de fonctionner de Tomislav marche aux coups imprévisibles que lui-même ne perçoit pas.

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Ayleen McKinney

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MessageSujet: Re: Tomorrow Never Came - Tomislav   Tomorrow Never Came - Tomislav EmptyLun 23 Oct - 11:51

Tomorrow Never Came
Tomislav & Ayleen

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Un mètre, ou deux, voir trois tout au plus finalement lui semblent être une bonne idée. Ayleen s'avance, se recule, se déporte et s'écarte de parts et d'autres de son invité dans un méli-mélo de petits pas agités exécutés et noyés dans le flot rapide de ces mots qu'elle prononce avec tant de difficulté. Elle se déplace, lui fait face, se détourne et le contourne quelque peu, faisant mine de protéger, de gestes maladroits de la main, les bestioles qui s'agitent de plus en plus le long du tissus sale qui recouvre ses épaules. A chaque mouvement elle la sent, à chaque inspiration, à chaque coup de paume levée vers ses rats ; à chaque fois elle sent cette odeur corporelle gênante, cette odeur de crasse écrasante. Elle sent cette odeur pleine de miasmes, bourrée de pathétisme mais aussi et surtout de tout un marasme qui émane d'elle et dont elle tente de le protéger. En vain. Tous les pores de sa peau puent la peur, la dégueulasse transpiration de ceux qui se font dessus face à la mort, la défécation sensible de l'humain sans couilles et sans courage. Elle embaume la tristesse, l'encens fumant de la défaite. La déprime en fragrance qui souille ses lèvres et ses traits juvéniles, qui rend crade ses cheveux et le coin de ses yeux malgré le fait qu'elle s'asperge en continue de « l'air de rien », parfum des faux-culs, des hypocrites. Parfum des lâches.
« Ah ! Et tu fais quoi exactement des poils, des os et des queues ? Tu en fais des boules comme les hiboux c'est ça ? Tu les recrache uniquement les soirs de pleine lune ou tu les digères comme les serpents avec de l'acide ? » Elle, elle pouffe immédiatement, ce qui a pour conséquence de décrasser un peu ses poumons et ses sentiments ternes. Lui, il a le coin des lèvres qui se relèvent à peine sur le coup. Il a les joues qui se tiraillent, qui fendent sa peau lisse et blafarde autour de ses commissures. Il étire toute cette bouche qui arbore la forme d'un joli cœur sur tout son être qui en semble pourtant dépourvu. Tom sourit, à sa manière ; ce qui sur l'échelle de la drôlerie équivaudrait probablement à une salle comble, pliée en deux, se cramponnant le ventre parce que secouée par de nombreux spasmes de rire.« Ahaha tu as donc plus d'expressions que Kristen Stewart, c'est bon à savoir ça ! Enfin bref. L'odeur vient bien de moi et pas des rats tu as raison. Je ne vais pas t'imposer ça plus longtemps, je vais aller me doucher...Je fais vite promis juré. En attendant je te confis la garde de ton repas journalier, ils vont faire leur vie dans la maison. Tu peux faire le tour du propriétaire ou si tu veux prendre un truc à boire avec mon père dans la cuisine avec son nouveau mec tu peux...enfin bref tu fais ce que tu veux quoi, fais comme chez toi. » D'un haussement d'épaules, elle tourne les talons et jette un à un ses rats sur le velours côtelé d'un des canapés qui meublent et encombrent autant la pièce que les piles de livres qui s’amoncellent ça et là. Billy sur les talons qui fait grincer ses minuscules roulettes, elle délaisse le serbe pour la politesse de la salle de bain juste un étage au dessus.

Là, dans la douche, les gouttelettes martèlent l'acier de sa bouteille. La vapeur s'emmêlent autour des tuyaux et le corps rougit tout entier sous la chaleur. Ayleen se lave, arase sa peau, la frotte au point de s'irriter, de s'écorcher, de se faire mal. Elle tire sur les cuisses et les bras, frictionne le dos et les joues, maltraite la cage thoracique et tout cet amas de chaire à la maladie tyrannique. Et puis après, la chevelure trempée, les lianes couleur caramel qui se prennent dans le tissage de ses vêtements, elle s'habille aussi rapidement qu'elle le peut. Précipitamment, encore humide, les extensions transparentes de Billy tordues sous sa robe et tirent sur son nez, elle se présente à nouveau face à Tomislav en lui tendant une enveloppe épaisse. « Tiens, c'est ton paiement. Ça va j'ai pas été trop longue ? Tu as pu t'occuper ? J'ai mis du parfum ça devrait être plus agréable pour tes narines maintenant. On va la voir ? » Pieds nus, elle se dirige vers la porte d'entrée. Sans broncher il marche derrière elle qui foule le béton comme une hippie un peu dérangée pour ces passants qui bousculent ses volants légers et colorés de fleurs brodées. « Wow ! C'est toi qui a tout tout tout fait dessus ? Même la peinture ? » Elle tente de siffler quand elle aperçoit la vieille carlingue à nouveau jeune et rutilante, mais ses incisives ne font que postillonner derrière une quinte de toux assez bien contrôlée. Soufflant, elle se tourne vers lui qui renfrogne son front face à la tonne de billets verts qui s'éparpille entre ses doigts et l'enveloppe ouverte. « 10 500 dollars ça te va, c'est bon ? C'est le budget que j'avais – enfin que mes « pères » ont calé pour la retaper entièrement mais je sais qu'ils ont vu un petit peu trop large...Surtout pour quelque chose dont je ne vais que très peu me servir au final haha. Enfin, le truc auquel j'ai pensé c'est que je ne vais plus pouvoir te dispenser...enfin te faire de cours – pardon – maintenant. Je suis trop malade pour ça, je vais rentrer dans quelques mois à l’hôpital alors du coup j'aimerai me faire pardonner en augmentant un peu ce que je te dois si tu es d'accord. » Ça lui paraît désormais si terriblement futile de parler de sa propre mort comme ça qu'elle en esquisse un pauvre sourire. Un sourire naze, à peine levé en l'air, qui bande mal, un sourire qui bande mou. Un sourire blanc, plein de ciment qui s'effrite, qui tombe en ruine, aux fondations branlantes. Un sourire d'arnaqueur; un masque marbré qui perd quelques grains de poussière en chemin quand elle secoue la tête. Un sourire du quotidien, celui des comédiens, celui de ceux qui vous balance aisément « tout va bien. ». Elle en rigole pour enjoliver le tout, arrondir les angles, ramasser la merde mensongère qui en tombe et qui tiraille ses traits fatigués. « Roh aller, fais pas cette tête là il y a plein de gens bien meilleurs que moi pour t'en filer des cours comme ça, c'est quasiment le business de tous les étudiants du coin. Prend tout s'il te plaît, c'est largement mérité vu tout le boulot que tu as fais dessus. Elle était dans un sale état et maintenant elle claque vraiment. Ça te fera de quoi payer une autre personne pour te préparer tranquillement et comme ça j'aurai la conscience plus tranquille. » Déconfit, elle l'observe tordre l'argent, le chiffonner pour le tasser au cul du sachet de papier. Pendant une minute elle ne comprend pas trop et puis elle capte ses sourcils froncés. Énervé c'est ça, il semble énervé. « Il y a quelque chose qui ne va pas ? Tom' ? »

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MessageSujet: Re: Tomorrow Never Came - Tomislav   Tomorrow Never Came - Tomislav EmptyMar 31 Oct - 15:47


Ayleen & Tomislav // Tomorrow never came
⚜️ Ce que l'on fait dans sa vie résonne dans l'éternité.⚜️

Elle le fait rire, genre vraiment. Ayleen semble possédée le même humour extrêmement bizarre qu’il peut parfois avoir et que personne ne comprend vraiment. Sauf elle. Pas pour rien qu’il l’aime bien. Pour ça et pour ses goûts vraiment trop bizarres pour la déco et pour tout le reste d’ailleurs. D’ailleurs, il n’voit pas qui c’est cette Kristen machin-chose. Certainement une icône d’un truc bien américain qu’il ne connait pas encore. Il sait que sa précarité lui donne de longs mètres de retard en terme de culture artistique bien qu’il ait mit du cœur à s’instruire par lui-même en dehors des cours. Parce qu’il était hors de question qu’il arrive sur le territoire con comme un manche et aussi vide qu’une cruche.

- L'odeur vient bien de moi et pas des rats tu as raison. Je ne vais pas t'imposer ça plus longtemps, je vais aller me doucher...Je fais vite promis juré. En attendant je te confis la garde de ton repas journalier, ils vont faire leur vie dans la maison. Tu peux faire le tour du propriétaire ou si tu veux prendre un truc à boire avec mon père dans la cuisine avec son nouveau mec tu peux...enfin bref tu fais ce que tu veux quoi, fais comme chez toi.

Il la regarde partir sans rien dire, l’observe galérer avec cette bouteille d’oxygène qu’elle nomme Billy. Pas sûr de comprendre le concept de donner un nom à un objet… Peut-être pour l’humaniser ? Ayleen a l’air d’être seule parfois, possible que le fait de pouvoir considérer ce truc comme de la compagnie l’aide se sentir presque accompagnée d’une personne.
Tomislav observe les rats faire effectivement leur vie dans l’appartement, sans se soucier un seul instant de la présence du jeune serbe. En revanche, ce dernier porte un intérêt particulier à l’environnement de celle qu’il pourrait presque considérer comme une « amie ». Elle l’aide depuis un moment déjà, s’est toujours montrée patiente avec lui, voir gentille. Quoi qu’un peu moqueuse mais que la jeune femme se rassure, elle s’en est tout autant prit plein la gueule que lui sans même le savoir.
Il se permet de toucher les vinyles, d’en lire les titres avec parfois un peu de difficultés – font chier à utiliser des « th » et des « w » a tout va qui doivent être prononcer comme si votre langue caressait tendrement vos dents de devant pour l’un ou de bouger la bouche de manière étrange pour faire un son qui lui semble inexistant parfois. « Were » qu’il a envie de prononcer « vere » en roulant bien le « r » et en envoyant parfois se faire foutre toute cette putain de langue qui le gonfle. Pourtant, il fait des efforts pour montrer aux services Américains qu’il n’est pas là pour glander mais bien pour s’intégrer. Job trouvé, appartement trouvé, apprentissage de la langue… tout – ou presque – est réuni pour essayer de prétendre à un papier qui lui permettra de rester sur le territoire. Encore faut-il que les choses s’accélèrent puisqu’il est désormais en période d’illégalité et que lorsque les services lui tomberont sur la gueule, il aura tout intérêt à justifier de ses bonnes volontés.

Tomislav s’attarde également sur des bouquins, des films et sur cette déco qui est vraiment peu commune. Il aime les trucs étranges, qui sortent du commun mais là ? C’est un véritable trésor de bizarrerie en tout genre et de truc vieillot qu’il a déjà vu chez sa feue grand-mère.
Des pas sur le parquet puis dans les escaliers le tire de cette lecture qu’il connait déjà dans sa langue et qu’il tente de relire dans une autre, pour une meilleure compréhension. Il délaisse le « Portrait de Dorian Gray » pour Ayleen qui s’approche, cheveux mouillés, robe propre sur le dos.

- C’est mieux, t’as l’air vivante pour de vrai.


Et pas d’une nana en phase de mourir. Horrible mais vrai. Elle n’a pas ôtée mille couche de crasse non plus mais Tom la trouve jolie là, comme ça.
La jeune femme lui tend une enveloppe épaisse sous ses longs doigts qu’il palpe, curieux.

- Tiens, c'est ton paiement. Ça va j'ai pas été trop longue ? Tu as pu t'occuper ? J'ai mis du parfum ça devrait être plus agréable pour tes narines maintenant. On va la voir ?
- Pourquoi tu poses pleins de questions si tu laisses aucun temps pour répondre ?

Il grommelle et la suit sans rien répondre même si effectivement il peut sentir ce parfum ni trop dosé, ni trop peu. Juste quelque chose de léger et de bien plus agréable que cette odeur de vieux et de renfermée de tout à l’heure.

- Wow ! C'est toi qui a tout tout tout fait dessus ? Même la peinture ?

Il se contente d’acquiescer, esquisse un léger sourire de la voir si heureuse, presque comblée de son œuvre. C’est vrai qu’il est content de ce qu’il a fait sur cette bagnole, faut croire que ses années à bosser dans divers garages pour réussir à venir aux Etats-Unis ont portés leur fruit. Surtout sur les vieilles bagnoles pour lesquelles il pourrait en faire sa spécialité. Il aime bien se plonger dans leur réparation… tout dépend de ces humeurs.
Pendant que la jeune femme s’extasie – et tousse en crachant littéralement -, Tomislav ouvre l’enveloppe et en sort les billets. Bordel de merde, c’est quoi tous ce vert entre ces doigts ? Il n’en demandait pas tant et les coupures qu’il compte sont bien plus grosses que ce qu’il avait demandé.

- 10 500 dollars ça te va, c'est bon ? C'est le budget que j'avais – enfin que mes « pères » ont calé pour la retaper entièrement mais je sais qu'ils ont vu un petit peu trop large...Surtout pour quelque chose dont je ne vais que très peu me servir au final haha. Enfin, le truc auquel j'ai pensé c'est que je ne vais plus pouvoir te dispenser...enfin te faire de cours – pardon – maintenant. Je suis trop malade pour ça, je vais rentrer dans quelques mois à l’hôpital alors du coup j'aimerai me faire pardonner en augmentant un peu ce que je te dois si tu es d'accord.

Elle lui balance ça comme si c’était quelque chose de normal, de naturel. Que ça n’était pas si grave d’apprendre que de 1) cette nana allait rentrée à l’hopital et que vu sa gueule ça n’présageait rien de bon. Et quoi qu’on en dise, Tomislav s’est attaché à ce squelette ambulant, à cette nana qui parle et qui parle sans qu’il n’ait le temps de lui répondre. Et de 2) il pouvait dire adieu à ses cours d’anglais.
Donc adieu à sa carte verte, à sa progression, parce qu’il doit encore apprendre, se perfectionner et que les mecs du contrôle vont certainement pas se la jouer compatissant s’il explique que la nana censée l’aider est à l’hosto. Non, ils n’en ont rien à foutre. Ca sera juste un coup de pieds au cul pour le jeter hors du territoire.
Dire qu’il aurait pu tout simplement se réjouir de ces 10 500 dollars… Une somme largement suffisante pour vivre tranquillement pendant plusieurs mois, sans se foutre la pression.
Ayleen en rigole, lui pas. Ca l’énerve qu’elle le fasse parce que putain la situation n’a rien de drôle. C’est peut-être sa manière à elle de dédramatiser la chose mais elle n’est pas toute seule à être impacter par ces poumons aussi asséchés qu’un pruneau trop sec sous le soleil.

- Roh aller, fais pas cette tête là il y a plein de gens bien meilleurs que moi pour t'en filer des cours comme ça, c'est quasiment le business de tous les étudiants du coin. Prend tout s'il te plaît, c'est largement mérité vu tout le boulot que tu as fais dessus. Elle était dans un sale état et maintenant elle claque vraiment. Ça te fera de quoi payer une autre personne pour te préparer tranquillement et comme ça j'aurai la conscience plus tranquille.

Se préparer tranquillement ? Mon cul. Il pourrait bien avoir 10.000 dollars de plus que ça ne l’aidera pas à aller plus vite. C’est le boulot de tous les étudiants du coin, certes, mais trouvera-t-il quelqu’un de suffisamment patient, sympa pour le faire ? Pas un de ces connards négligeant qui prendra son temps pour lui enseigner la langue dans le but de se faire le plus de thune possible ? De toute façon son temps est déjà écoulé et tout ce qu’il a fait jusqu’ici commence à partir en fumée.
Putain. Il entasse les billets sans le moindre respect pour ces derniers, tout au fond de l’enveloppe. Si sa mère le voyait faire, elle lui en collerait une bonne dans la gueule.

- Il y a quelque chose qui ne va pas ? Tom' ?

Si quelque chose ne va pas, c’est peu de le dire bordel. Mais quelque chose en lui le pousse à avoir honte de ce genre de réaction. Il est triste pour elle et c’est peut-être aussi ça qui le fout en rogne parce que son but n’était pas de s’apitoyer sur le sort de la jeune femme, continuer de la considérer comme une nana lambda qui lui donne cours et point barre. Pourtant aujourd’hui il est triste de la savoir en si mauvais état de santé tout comme il est profondément énervé qu’elle le lâche comme une merde à son sort avec des « t’inquiète pas, y en a pleins d’autres qui le feront à ma place ».


- J’ai pas envie d’une autre цонне* pour apprendre l’anglais.


Il lâche un juron en serbe, trop frustré de devoir s’exprimer en américain alors qu’il n’est qu’une boule d’agacement, que ses mots lui manquent et qu’il a du mal à les aligner.

- J’ai aucun temps de plus pour chercher un autre personne pour faire cours. Tu es la seule assurance que j’ai pour montrer que j’veux m’intégrer ici alors j’fais quoi si tu lâches ma situation ?

Il va tout simplement prendre ses cliques et ses claques et quitter le territoire avec pour seul droit de fermer sa gueule et ce malgré tous ces efforts pour montrer aux américains qu’il n’est pas là pour exploiter le système. Juste sa demi-sœur. Putain, rien que de penser à elle, ses nerfs s’enflamment un peu plus. Encore une fois, elle s’en sortira mieux que lui, elle y aura le droit encore pour longtemps à ces rêves américains pendant que lui galère comme un sale connard pour s’en sortir. Toujours le même schéma que Tomislav n’a pas réussi à inversé alors qu’il était si proche du but.

- De toute façon, c’est déjà foutu pour moi, la délai est dépassé ou presque, j’vais être dans l’illégalité bientôt. Tout ça pour rien. Les contrôles américains vont se foutre de savoir si je chercher quelqu’un d’autre pour apprendre, même si j’ai une travail, un appartement où vivre, ça suffira plus. J’vais me faire renvoyer chez moi.

La défaite avouée était plus dure qu’il ne l’aurait cru. Il est furieux mais froid, prit de court alors qu’il possédait toujours un coup d’avance. Mais pas cette fois et la désillusion fut bien plus brutale qu’il ne l’avait imaginé.

- курва**Et tu peux pas annoncer ça aux gens comme si c’était normal. Il va se produire quoi, la mort ? T’es mal à ce point ?

Dire qu’il comptait l’emmener dans un de ces musées bizarres où elle aurait pu vouloir se bouger un peu pour reprendre vie. Tout ça n’avait plus la moindre importance maintenant, loin de là.

*Conne
**Putain


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Ayleen McKinney

Ayleen McKinney
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MessageSujet: Re: Tomorrow Never Came - Tomislav   Tomorrow Never Came - Tomislav EmptyMar 2 Jan - 21:15

Tomorrow Never Came
Tomislav & Ayleen

Hey, what you doing ? Not a lot. Shaking and moving in a local spot. Baby don't asky me why, don't ask me why

Deux enfants. Là, dans cette rue, deux enfants sous la chaleur déjà écrasante, sur le pavé lisse du béton qui crame la voûte nue des petits pieds. Deux gamins sous le soleil qui tape et dont la lueur leur tombe lourdement dessus de façon aveuglante. Ça crispe leurs yeux, ça enserre leur regard,  ça fait chier leur vue. Deux mioches, deux gosses aux traits encore juvéniles sous les signes de plus en plus visibles de l'âge adulte, de ses réflexions et de ses problèmes inutiles souvent complètement cons. Des problèmes qui viennent percer leur nonchalance, qui viennent s'imposer avec beaucoup d'imprévu et surtout pas mal d'indécence. Ayleen interloquée se dresse par cette réaction un poil trop négative pour quelqu'un qui reçoit entre ses mains autant de pognon. Elle a le capot éclatant de la bagnole rutilante sous ses ongles rongés, sous ses paumes tout juste lavées. Elle a le gravier grossier qui lui rentre et éraille l'arc de ses talons bombés. Elle a le mégot d'une clope laissé là qui se coince sous l'un de ses orteils ; un bâton qui dégage encore ses cendres froides, qui imprime sa peau ; un filtre mousseux qu'elle roule du pied, qu'elle jette du haut du caniveau d'une mine dégoûtée. Elle le regarde s'éloigner, tourniller sur lui même et puis tout simplement tomber. Elle le regarde lui, et puis elle regarde Tom à nouveau. Lui, elle le contemple plutôt, elle le détaille avec attention pour anticiper sa réponse. Autour d'eux les gens passent, les contournent. Ils les évitent ou bien les bousculent, ils se tournent. L'un remarque la liasse de biffetons entre les doigts, un autre lorgne carrément dessus pour continuer son chemin un plus loin, plein de regrets, dans la rue. Ça marche, ça passe, ça s'éloigne d'eux, eux deux qui ne bougent pas, qui ne remuent toujours pas. Ayleen attend, Ayleen comprend. Tout en lui se crispe. Tout en lui se tend et se sert subitement mais de façon assez subtile paradoxalement. Les contours osseux de sa mâchoire s'accentuent sous l'impulsion de quelques coups de dents. Les coteaux luisants de son bec de vautour s'écrasent et ses yeux ronds de rapace la fixent, ne la quittent pas, tenaces. Les longues griffes de ses doigts éreintent l'enveloppe, froissent les billets, percent le papier blanc, chiffonnent le tissus vert des billets comme s'il s'agissait plus d'une vulgaire proie que d'un apport de choix. Il la met mal à l'aise. Soudain ça la frappe, l'idée perce et la gêne. Il ressemble à un sale mioche comme ça avec ses airs hautains de prince sibérien. Il ressemble à une petite merde capricieuse, à un petit connard qui a envie de tout balancer à son paternel avec sa mèche lissée et ses vêtements noirs taillés bien droits. Il ressemble aux fils de ces Tsars qu'on a souvent peint autrefois, il a leurs traits bourgeois, ténébreux et froids, les couleurs de l'hiver au bord de ses lèvres pâles dénuées d'une quelconque nuance rosée. Il parle, exige plutôt. Il balance des mots qu'elle ne comprend pas, des syllabes, des sons ou bien des phrases aux accents d'insultes, aux tons plein de tumultes. Il renfrogne autant sa gueule que toute cette monnaie pliée, presque arrachée sous sa poigne en étau serré.


« Oui la mort Weirdo. C'est ça qui va arriver de grave. » Elle ne peut réprimer un léger agacement mélangé à quelques tremblements. Tripotant machinalement le joint chaud de caoutchouc de la portière close de sa voiture à peine refaite, elle enchaîne gorge serrée sur sa fatidique vérité, hésitant à intégrer l'intérieur du véhicule pour parler dans un endroit plus approprié, dans un peu plus d'intimité. « J'ai une maladie grave je te l'ai déjà dis mais c'est le genre de truc qui ne se guéri pas comme ça. Je dois presque attendre un miracle... En gros pour te la faire courte j'ai la mucoviscidose et je ne sais pas comment on dit ça chez toi. Je dois rentrer à l’hôpital en décembre pour une greffe des poumons. Je dois donc attendre que quelqu'un comme moi, jeune dans le meilleur des cas, compatible parfaitement en tout cas meurt pour que j'hérite de ses organes, en espérant être assez haut placée dans la liste pour ne pas mourir avant. » Les idées morbides traînées en fardeau pendant ces derniers mois se font enfin matérialiser dans le timbre rocailleux de cette foutue voix faiblarde qu'elle peine à maîtriser. Ça la fait blêmir et chanceler. Ça la fait pâlir. Accoudée au toit d'une guimbarde ancienne qu'elle ne conduira pas et probablement jamais, elle fourre sa tête et ses cheveux agréablement humides dans le creux de ses bras. Elle a des mèches qui se détachent de sa nuque qui soudain se met comme à cuire sous les affres de l'astre dont la puissance ne faiblit toujours pas. Sous sa peau, le métal bouillonne, Billy contre son mollet aussi, le goudron fond, les égouts puent, les échappements menacent de la faire tousser et elle se laisserait presque aller, elle se laisserait presque glisser au sol pour se mettre à pleurer au lieu de tout simplement se retourner vers celui qui se permet de percuter son marasme sans avoir l'air d'éprouver ne serait-ce qu'un peu de compréhension si ce n'est de la pitié. « Écoute Tom, calme toi, il y a forcément une solution. Au pire je peux continuer à te donner tes cours à l’hôpital, tu n'auras qu'à venir me voir dans ma chambre et on arrêtera un petit temps quand je recevrais ma greffe...ou quand...enfin voilà. Par la force des choses quoi. » Elle ose à nouveau porter ses yeux sur lui. Il s'est rapproché pour mieux l'entendre. Il lui fait de l'ombre, il l'englobe de toute sa hauteur, de toute sa noirceur dans la chaleur. Ce qu'elle propose ne lui semble pourtant pas suffisant. Elle décèle encore de l'inquiétude, de l'impatience aussi et surtout de l'urgence. Ce type est clairement désespéré. Une situation dans laquelle Ayleen n'a aucun mal à se projeter, sentant elle aussi une certaine sentence à venir menaçant d'absolument tout écrouler. « Sinon... Il y a le mariage blanc. » La solution vient percuter autant sa bouche que sa conscience, surprise au fond que ce garçon n'ait jamais pu y songer. « Tu n'y a jamais pensé en arrivant ici ? Ça se fait de plus en plus souvent dans le pays en plus. En gros il y a des filles ou des garçons hein, ça dépend de ce que tu vises, qui, en échange de tout l'argent que je viens de te filer, pourraient parfaitement accepter de t'épouser pour que tu puisses rester et obtenir la nationalité. Il te faudra juste être super prudent avec les services de l'immigration et préparer des preuves de ta relation avec eux mais tu pourras trouver des gens pour te conseiller. En même temps je pourrais continuer à t'aider, faire des attestations sur l'honneur comme quoi tu cherches à apprendre, à t'intégrer enfin ce qu'il faudra leur donner pour les contenter. Je peux te trouver quelqu'un dans le cercle d'étudiants que je connais qui serait prêt à faire ça, une pas trop laide au pire si tu veux nouer quelque chose, joindre l'utile à l'agréable, ou un mec je n'en sais rien je ne te connais pas. Ou alors je peux le faire moi. Je peux t'épouser si tu veux. »
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